Le 22 mai dernier, elle soufflait déjà sa troisième bougie. Promulguée en grande pompe en 2019, la loi PACTE introduisait, en autres, pour la première fois dans le droit français la notion de « qualité de société à missions ». Avec cette nouveauté, n’importe quelle entité économique pouvait désormais inscrire dans ses statuts une raison d’être, ainsi que des objectifs environnementaux et sociaux.
Bien qu’ayant mis en avant ce concept, les pouvoirs publics ne l’ont pas pour autant défini clairement. Il suffit de se référer à l’article 1835 du Code Civil pour s’en rendre compte. « Les statuts des entreprises peuvent préciser une raison d’être, constituée des principes dont la société se dote et pour le respect desquels elle entend affecter des moyens dans la réalisation de son activité. » Plutôt évasif et cursif. Trois ans et une crise sanitaire plus tard, la RSE est plus que jamais une priorité fondamentale pour les entreprises. Quête de sens, engagement, authenticité… Les consommateurs sont de plus en plus exigeants et méfiants. Du coup, comment faire pour qu’une raison d’être ne soit pas un simple exercice déclaratif, mais qu’il soit également et surtout performatif ? Avec son mantra, « de la raison d’être à la raison d’agir », l’agence dps partage et porte auprès de ses clients ce changement de paradigme. Aux côtés de Benjamin Le Clercq, Directeur Général Adjoint chez dps, l’équipe de J’ai un pote dans la com, tente de faire le tour de la question.
La finalité d’une marque se résume à travers ses choix
Il y aura clairement un avant et un après. Au-delà de ses nouveautés législatives, la loi PACTE pousse indirectement la société à se poser une question d’essence presque philosophique. Quelle est aujourd’hui la finalité d’une entreprise ? C’est avant tout une entité qui doit avoir conscience du monde dans lequel elle évolue. Au vu des nouvelles attentes et revendications des consommateurs, un annonceur ne peut plus se positionner comme un simple incitateur d’achat. Il doit également être acteur dans la vie des citoyens en assumant des responsabilités sociales et sociétales. En d’autres termes, désormais une entreprise doit faire des choix – dans sa communication, son approvisionnement, dans la fabrication de ses produits – et les assumer. Chacune de ces prises de position impacte l’image que les consommateurs se font d’une marque, mais elles peuvent également avoir une incidence sur la société de manière globale.
« Cela peut sembler utopique, mais je pense sincèrement que toutes les entreprises peuvent avoir une utilité autre qu’économique. On peut vendre des couches, des voitures ou des machines à laver, ce sont les choix en matière de prise de parole et d’actes qui définissent une entreprise. Souvent, on perçoit cet état de fait comme une évolution du rôle des entreprises. Je ne suis pas d’accord, cela existe depuis toujours, ce bon sens s’est juste révélé aux yeux de tout le monde. Le rôle des marques dans la société n’a pas fondamentalement changé, c’est la perception et les attentes des consommateurs qui ont changé », commente Benjamin Le Clercq, Directeur Général Adjoint chez dps.
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De l’impérieuse nécessité de rechercher de la justesse, plutôt que du sens
Selon une étude du cabinet BCG BrightHouse publiée en début d’année, 73% des sociétés du CAC 40 et 60 % des entreprises du SBF 120 ont adopté une raison d’être depuis 2019. Vu de cette manière, les grands groupes jouent le jeu et semblent montrer l’exemple. Pour autant, toujours selon cette étude, 64 % des collaborateurs interrogés n’ont jamais entendu parler de la raison d’être de leur entité ou déclarent ne pas très bien savoir de quoi il s’agit. Sans être surprenant, ce décalage dresse les premiers écueils de cette notion de raison d’être.
En effet, l’engagement d’une entreprise doit se manifester à deux niveaux. Le premier, le plus évident, c’est envers les consommateurs. Plus de 91% des Français estiment que les entreprises doivent jouer un rôle moteur dans les changements sociaux et environnementaux. Lassés des discours sans lendemain de la part des politiques, les consommateurs déportent donc clairement leurs espoirs et leurs attentes sur les marques, plutôt que sur l’action publique. Le second niveau d’engagement d’une marque doit s’effectuer en interne.
Les entreprises doivent être capables d’impliquer leurs salariés à travers cet engagement, sinon ce dernier n’aura pas l’effet escompté. Partageant cet avis Benjamin Le Clercq, Directeur Général Adjoint chez dps, pousse même la réflexion plus loin en s’interrogeant sur cette fameuse expression de « quête de sens ».
« Donner du sens à quelque chose, qu’est-ce que cela veut vraiment dire ? Selon les entreprises ou les consommateurs, la notion de sens peut être multiple. Chez dps, nous préférons plutôt parler d’une quête de justesse. Un annonceur ne va pas communiquer de la même manière sur ce sujet selon ses différentes audiences. La complexité est d’être juste entre la perception du public et la connaissance de son propre marché. Il faut réussir à trouver une corrélation entre ce qu’une marque dit et ce qu’une partie des consommateurs ont besoin d’entendre. Ensuite, il faut bien garder à l’esprit que communiquer en faveur de l’écologie ou contre les discriminations ne fait pas pour autant d’un annonceur une marque engagée. Cela serait trop facile. Il ne suffit pas de revendiquer des choses, il faut savoir les révéler et les prouver à travers ses actes. Dire, c’est faire ».
Pour éviter l’overdose de raison d’être, il faut passer à la raison d’agir
Depuis la loi PACTE, la raison d’être est devenue le nouveau cheval de bataille des marques. Pour que cette frénésie ne soit pas qu’un écran de fumée, il faut que chaque partie prenante comprenne que notre société actuelle ne peut pas considérer la RSE comme un effort, mais bien comme un actif immuable. Au début de la digitalisation, une frénésie numérique s’est emparée des annonceurs. Tout le monde voulait en être et en faire. De nos jours, la question ne se pose même plus de savoir si le digital doit faire partie d’un plan de communication. Il faut partir de cette même approche et suivre cette même logique. Le jour où il n’existera plus de direction RSE isolée, mais qu’elle sera directement intégrée dans les directions de communications, alors la victoire sera collective aussi bien pour les agences, que pour les annonceurs et les consommateurs.
« Effectivement, la RSE doit faire partie de l’ADN d’une entreprise et infuser à tous ses niveaux d’actions. Souvent, les annonceurs pensent qu’il est impossible de concilier Engagement et Business, mais c’est faux. Bien sûr, il n’existe pas de formule magique, chaque entreprise doit concilier sa raison d’être et sa raison d’agir au cas par cas. Pour schématiser, je perçois trois types de marques. Celles qui sont nées dans notre monde actuel, elles ont du coup pleinement conscience des nouvelles façons de consommer comme NOUS antigaspi ou encore les assurances Luko. Celles qui sont portées par leurs produits comme Véja ou Patagonia. Ces annonceurs n’ont pas besoin de communiquer sur ces sujets, elles ont simplement besoin de mettre en valeur leurs produits. Et enfin, les entreprises historiques qui essayent de se créer un vernis, plus ou moins friable, selon la cohérence de leurs paroles et de leurs actes. Pour réussir, elles doivent remplacer jusqu’à leurs fondamentaux. C’est ce que nous faisons avec Décathlon qui repense totalement le concept de carte de fidélité. C’est à travers ce type d’initiative qu’un annonceur arrive non pas à convaincre, mais à être juste. »
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