Imaginez. Vous envoyez une lettre très personnelle à un proche. Quand ce dernier la reçoit, le facteur annonce qu’il l’a lue, et qu’il s’en inspirera pour écrire ses propres missives. Vous vous sentez trahi ? Et bien c’est ce qu’ont ressenti tous les utilisateurs de WeTransfer quand ils ont appris que le service mondialement connu ambitionnait de nourrir une IA à partir des contenus qui transitent sur sa plateforme. Un bad buzz immédiat, mais surtout une opportunité en or pour les alternatives à WeTransfer… Smash en tête. Décryptage avec Romaric Gouedard-Comte, co-fondateur et CEO de Smash.
La polémique WeTransfer, un bad buzz en deux actes
23 juin : WeTransfer, le très populaire service de partage de fichiers (80 millions d’utilisateurs mensuels revendiqués, dans 190 pays), met à jour discrètement (enfin, pensait-il) ses Conditions Générales d’Utilisation. Ces dernières mentionnent désormais que les utilisateurs du service accordent à WeTransfer « une licence mondiale, non exclusive, transférable, sous-licenciable et gratuite pour utiliser, copier, modifier, distribuer et créer des œuvres dérivées de vos contenus — y compris dans le cadre de l’entraînement et du développement de modèles d’apprentissage automatique ». En d’autres termes : WeTransfer aurait la possibilité de lire et d’utiliser les fichiers qui transitent par son site pour entraîner et nourrir une IA. We… mais non !
Attention, ⚠️ note de service: Comme beaucoup de plateforme, Wetransfert vient de changer ses CGU qui lui permettent désormais d’acquérir un droit de licence de vos contenus. Préfères donc Swisstransfer, Smash ou TransferNow.
— Gerald Holubowicz (@geraldholubowi.cz) 2025-07-15T06:03:44.629Z
15 juillet : cette évolution des CGU arrive aux oreilles du marché de la tech puis des créatifs (les utilisateurs numéro un du service), créant instantanément un bad buzz mondial pour l’entreprise hollandaise. Cette dernière est alors obligée de dégainer un communiqué pour tenter de rassurer ses utilisateurs et d’éteindre l’incendie. Mais il est trop tard, le mal est fait. Les utilisateurs se tournent déjà vers les alternatives à WeTransfer… et à ce petit jeu-là, c’est Smash qui marque des gros points !
Smash, une alternative 100% française
Smash est lui aussi un service de partage de fichiers. Comme WeTransfer, il permet d’envoyer de lourds fichiers, de façon simple et intuitive. Mais il a également de nombreux atouts dans sa manche. D’abord, c’est une entreprise familiale, aujourd’hui dirigée par deux frères : Romaric et Rémi Gouedard-Comte. Ensuite, c’est une entreprise fièrement française. Créée en 2017 à Lyon où elle est toujours basée, Smash héberge ses contenus en Europe, et même en France pour les utilisateurs français. Enfin, et surtout, ils ont toujours fait de la confidentialité et de la sécurité des données leur cheval de bataille. Un pari plus que gagnant, 8 ans plus tard…
La mésaventure en mondiovision de leur principal concurrent ressemble donc à une formidable opportunité… qu’ils se sont empressés de saisir. Fidèles à leur tone of voice, aussi humain que piquant envers leur meilleur ennemi (Romaric, l’un des deux frères, avait annoncé sur LinkedIn le 1er avril dernier qu’il avait décroché un stage chez WeTransfer), ils dégainent une campagne qui pique leur rival là où ça fait mal.

Jeu, set, et Smash
Contrairement aux CGU de WeTransfer, la campagne va droit au but. Et comme leur service, elle envoie du lourd. Smash l’affirme haut et fort : WeTransfer(red) appartient au passé. Désormais, le présent est bel et bien Français : « et maintenant, nous smashons ! »

Déclinée en trois visuels, la campagne met en avant de façon simple et impactante le message de Smash : on fait tout comme WeTransfer, mais on est Français !

Le message est clair : si vous utilisez WeTransfer, et que vous cherchez une alternative, Smash est là pour vous. Romaric Gouedard-Comte, co-fondateur et CEO, revient pour nous sur cette véritable période charnière pour son entreprise.
Interview : Romaric Gouedard-Comte, co-fondateur et CEO de Smash

JUPDLC : Quand le bad buzz autour de WeTransfer a éclaté, comment l’avez-vous perçu ?
Romaric Gouedard-Comte : Je vais être honnête, j’ai été un peu étonné. Car à la base, on partage les mêmes valeurs avec WeTransfer. On s’adresse au même cœur de cible, les gens de l’industrie créative. C’est-à-dire tous ceux qui vivent de la production de leurs contenus et qui ont donc besoin de les transférer régulièrement, et ce en toute sérénité.
JUPDLC : Des personnes, qui justement accordent une très grande importance à la notion de propriété intellectuelle… qui a été mise à mal par les annonces de WeTransfer.
Romaric Gouedard-Comte : Exactement, et je pense que c’est une des raisons pour lesquelles le buzz a explosé. Là, ils ont touché à des gens qui sont des créatifs, et qui par définition sont très, très attachés à la propriété intellectuelle. C’est vraiment un sujet qui est très sensible, encore plus aujourd’hui avec l’omniprésence de l’IA qui inquiète et qui crée beaucoup de flous, notamment juridiques. Là, WeTransfer vient de conforter les craintes de tous ceux qui redoutent de voir leurs idées et leurs œuvres se faire exploiter par les IA.
JUPDLC : Quelles sont vos garanties chez Smash sur ce point crucial de la protection des données ?
Romaric Gouedard-Comte : Smash, en fin de compte, c’est un utilitaire. Ça permet juste de pouvoir envoyer des fichiers d’un point A à un point B. On essaie donc de faire en sorte que ça soit le plus performant possible et le plus simple possible à utiliser. Et dans notre mission, on intègre évidemment les notions de sécurité, d’éthique et de protection des données des fichiers de nos utilisateurs. C’est vraiment un sujet important chez nous, sur lequel on investit beaucoup de temps, d’énergie et d’argent, et qui fait partie de notre ADN depuis le départ. Notre garantie est simple : les fichiers qui transitent sur Smash ne sont jamais ouverts. Ils ne subissent aucun traitement, aucune action, aucune manipulation.
« Notre garantie est simple : les fichiers qui transitent sur Smash ne sont jamais ouverts. »
JUPDLC : Quel est l’impact concret de cette polémique pour Smash ?
Romaric Gouedard-Comte : Ce qui est bien pour nous, c’est que ça nous offre une visibilité forte. Et ce qui est encore mieux, c’est que ça tombe à un bon moment dans notre développement. Si c’était arrivé au début de notre aventure, on n’aurait pas été prêts. Là, on a 8 ans d’existence, 6 millions d’utilisateurs… Disons qu’on était déjà identifié par beaucoup d’acteurs du milieu, ce qui nous a permis d’être rapidement cités comme étant une des alternatives qui « tient la route ». Et ce à la fois sur le côté sécurité éthique et responsable, notamment à travers le côté environnemental qui nous tient également à cœur. Ce qui nous a surpris en revanche, c’est l’ampleur du coup de boost que ça nous a donné. Depuis 10 jours, on a une croissance à trois chiffres, à la fois sur les usages et les abonnements. C’est un emballement très fort, encore plus fort que celui vécu pendant le COVID, qui avait déjà été un accélérateur déterminant pour nous.
JUPDLC : Cet emballement est-il franco-français, ou dépasse-t-il les frontières ?
Romaric Gouedard-Comte : Notre croissance s’est accélérée dans le monde entier. Chez nous, la France a toujours été le pays numéro un. Et là, ça s’est inversé. On a explosé aux États-Unis, au Royaume-Uni… et même aux Pays-Bas, le pays historique de WeTransfer, qui est né à Amsterdam. Et ça, on ne l’avait pas anticipé. D’ailleurs, le site n’est même pas en Hollandais (rires).
JUPDLC : Devant cette opportunité quasiment inespérée, vous avez donc choisi de prendre la parole via une campagne aussi drôle qu’incisive…
Romaric Gouedard-Comte : Je vous avoue, que quand c’est arrivé, on a arrêté tout ce qu’on faisait (rires). On sait que beaucoup de gens vont chercher une alternative à WeTransfer, et que c’est le moment parfait pour être les plus visibles possible. On a donc saisi l’opportunité de réagir via différents leviers, dont cette campagne. Pour le ton, on est restés sur ce qu’on aime faire, c’est-à-dire un peu piquant. On fait peu de campagnes de pub, mais quand on prend la parole, sur LinkedIn notamment, on aime bien détourner la marque WeTransfer de façon drôle. Un peu comme les clashs Burger King – McDonald’s. Et l’avantage qu’on a, c’est que c’est une marque très forte, et qu’on n’a pas besoin d’expliquer ce qu’on fait. Les gens comprennent tout de suite qu’on est une alternative à WeTransfer.
« Le message est clair : on est l’alternative française numéro un à WeTransfer »
JUPDLC : Sur cette campagne, vous appuyez votre côté Français. Pourquoi ce choix ?
Romaric Gouedard-Comte : Le message est clair : on est l’alternative française numéro un à WeTransfer. Un de nos éléments différenciants est notre côté français. On est une entreprise française, et on héberge nos contenus en France. Et ça, c’est un gros plus pour les utilisateurs français. Ce qu’il faut savoir, c’est que la France est le marché numéro un de WeTransfer, et qu’il y a donc beaucoup d’utilisateurs en France à aller conquérir. C’est une énorme chance pour nous !
JUPDLC : Suite à ce coup de pouce bien involontaire de votre principal concurrent, quelles sont désormais vos ambitions pour Smash dans un avenir proche ?
Romaric Gouedard-Comte : Disons que la concrétisation de nos objectifs est en train d’avancer, et ce bien plus rapidement que l’on ne pensait ! On ne s’est jamais dit qu’on voulait dépasser WeTransfer. On est juste conscients qu’il y a un marché mondial du transfert de fichiers qui est énorme, et qui croît très rapidement. Avec l’émergence de l’IA, de plus en plus de contenus sont créés, et donc partagés. On a la chance d’être un acteur de ce marché en croissance, et on va continuer de se faire connaître.


