L’IA, amie ou ennemie de la DA ?

en collaboration avec moonlike
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À l’ère de l’intelligence artificielle générative, la création artistique en agence connaît une véritable révolution. Plus qu’un simple outil, l’IA devient un compagnon de travail, un espace d’expérimentation et même une source d’inspiration inattendue. Mais comment ce bouleversement redéfinit-il concrètement les rôles et les processus en direction artistique ? Quel impact a-t-il sur le travail des créatifs, sur l’authenticité des messages et sur la manière dont les marques interagissent avec leurs audiences ?

Pour explorer ces questions, nous avons rencontré Jason Sellito, Directeur de la Création en charge de la direction artistique au sein de l’agence moonlike. À travers cet échange, il nous livre sa vision des nouvelles tendances, des défis et des opportunités qu’offre l’IA dans la création visuelle. Entre surréalisme 2.0, hyperréalisme exacerbé, et nécessité de garder une intention humaine forte, l’IA est à la fois moteur d’innovation et gardienne d’une exigence essentielle : celle de réinventer sans jamais perdre de vue le sens.

 

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Jason Sellito. Crédit photo : moonlike

JUPDLC : La communication a toujours été en lien étroit avec l’art. Depuis l’avènement de l’IA générative, quelles sont les nouvelles tendances en termes de direction artistique ?

Jason Sellito : La communication a toujours trouvé dans l’art une source d’inspiration, en adoptant ses codes, ses émotions et sa capacité à provoquer des ruptures avec un message. Avec l’émergence de l’IA générative, cette inspiration devient plus interactive. L’IA n’est pas seulement un outil, elle est aussi un espace d’exploration où ces influences artistiques peuvent être réinventées. On observe l’émergence de tendances où le mélange des styles et des esthétiques devient la norme, comme un surréalisme 2.0 qui, comme le faisaient les artistes de ce mouvement artistique, laisse une grande part de hasard s’inviter dans leurs créations. À l’inverse, une tendance à l’hyperréalisme poussé à un point de détail impossible à capturer avec nos optiques actuelles fait aussi son apparition.

Le rôle du directeur artistique se transforme ainsi profondément. Nous devenons à la fois curateurs, chercheurs et parfois alchimistes, utilisant l’IA pour ouvrir de nouvelles possibilités créatives tout en se basant sur des références artistiques et populaires. Soyons réalistes, l’IA amplifie notre capacité à créer, mais in fine, comme dans l’art, c’est l’intention et la vision qui comptent.

 

JUPDLC : Comment l’IA s’intègre-t-elle dans les nouveaux processus de création artistique en agence ?

Jason Sellito : L’IA c’est un peu l’assistant DA ultra-doué dont nous avons toujours rêvé : capable en amont d’accélérer les phases de recherche et de maquettage, de rendre les brainstormings plus dynamiques en permettant de visualiser rapidement des ébauches de concepts ou trouver des références créatives.

Pendant la production, elle simplifie les tâches techniques ou répétitives, comme la préproduction et les déclinaisons, permettant aux DA de rester concentrés sur la vision d’ensemble et les choix stratégiques, plutôt que sur l’opérationnel. Dans une agence naturellement sociale comme moonlike, où les timings sont serrés, c’est un atout pour expérimenter en un rien de temps les premières idées jusqu’aux concepts plus avancés.

En bref, l’IA rend nos processus plus agiles, plus réactifs et pousse nos équipes à optimiser le temps passé sur ce qui compte vraiment : la big idea et le craft.

 

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Crédit photo : Cottonbro studio – pexels

JUPDLC : En termes de création visuelle, quelles sont les règles à suivre maintenant que l’IA a fait son apparition ?

Jason Sellito : Grâce à l’intelligence artificielle, il est possible de générer à l’infini … mais c’est précisément là que réside la nécessité de savoir où et quand s’arrêter. La clé, pour ne pas perdre bêtement des heures à prompter ou à générer la même image sous des centaines de variantes, c’est d’avoir une intention claire et de garder un cap sur la cohérence du message.

En prenant un peu de hauteur, on s’aperçoit que l’IA nous oblige à repenser notre collaboration interdisciplinaire. Nous ne travaillons plus seulement avec des illustrateurs, photographes, motions designers ou des concepteurs-rédacteurs, mais nous dialoguons avec une machine qui ne comprend pas l’intention humaine. Cela nous pousse à être plus précis dans nos prompts, plus rigoureux dans nos attentes, et paradoxalement, à mieux cerner ce que nous voulons réellement transmettre.

 

JUPDLC : Chez moonlike, comment êtes-vous parvenus à former vos collaborateurs sur le sujet ?

Jason Sellito : Nos équipes sont globalement assez jeunes et se sont approprié naturellement ces nouvelles technologies. En parallèle, nous avons mis en place des formations régulières pour que chaque membre de l’agence puisse intégrer ces outils dans son travail quotidien. Aujourd’hui, nous pratiquons une veille constante : chaque semaine, nous organisons des workshops pour découvrir les solutions émergentes. Notre objectif est de nous approprier ces technologies de manière organique, sans pression. L’IA peut sembler intimidante au premier abord, mais une fois qu’on commence à la manipuler, on réalise qu’elle est plutôt intuitive.

Un exemple concret : récemment, nous avons entièrement réalisé une campagne pour SNCF Réseau et Prévention Routière en utilisant l’IA, de la voix off jusqu’aux animations 3D. Cette expérience nous a permis de découvrir des possibilités audiovisuelles et techniques incroyables, tout en comprenant aussi les limites des outils actuels. Et qui, comme souvent, libèrent des solutions créatives inattendues.

JUPDLC : Du point de vue de la création artistique, quels sont les avantages de l’IA ? Avez-vous rencontré certaines difficultés liées à cette nouvelle ère ? Si oui, lesquelles ?

Jason Sellito : L’IA nous permet d’explorer et de produire à une vitesse jusqu’alors inimaginable, offrant à nos équipes plus de temps pour se concentrer sur des choix créatifs et stratégiques. Parfois, elle produit des résultats inattendus – ce qu’on appelle les « hallucinations » de l’IA, ces moments où elle interprète mal un concept ou qu’elle se force à nous donner une réponse malgré tout. Ces accidents créatifs peuvent être intéressants : avec le bon regard, elles peuvent même révéler des idées nouvelles.
La difficulté majeure en direction artistique réside dans le risque d’uniformisation des esthétiques. L’IA, en se basant sur des données et tendances passées, tend à reproduire des schémas visuels déjà vus. Pour un directeur artistique, le défi est de repousser cette répétition, en trouvant l’équilibre entre l’apport de l’IA et la recherche de nouveaux horizons visuels qui sublimeront l’originalité et la profondeur d’une idée.

 

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Crédit photo : Katrin Bolovtsova – pexels

JUPDLC : Parlons désormais de l’éthique : comment prévoyez-vous d’encadrer, chez Moonlike, l’utilisation de l’intelligence artificielle ?

Jason Sellito : Pour nous, l’IA est un outil au service des créatifs, pas une finalité. Chaque projet doit rester ancré dans une intention humaine, avec une vigilance particulière sur la provenance des données et la transparence des processus.
L’IA n’est pas une solution universelle, et elle ne convient pas à tous les projets. Nous restons toujours attentifs aux résultats produits : l’IA apporte de la puissance, mais il est primordial de garder un regard humain à chaque étape pour préserver l’authenticité du message.
Enfin, nous veillons à ce que nos clients comprennent précisément où et comment l’IA intervient, garantissant ainsi une utilisation respectueuse et alignée sur leurs valeurs.


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JUPDLC : Toujours sur le plan créatif, qu’apporte l’IA en termes de personnalisation du message ?

Jason Sellito : L’IA ouvre un champ immense pour affiner non seulement le visuel mais aussi le ton et l’accroche de chaque campagne en temps réel, en nous alignant avec les attentes de chaque audience tout en préservant la cohérence avec la tonalité de la marque.
En direction artistique, cela signifie aller au-delà de l’uniformité, en créant des univers distincts pour chaque segment de public sans perdre l’identité globale. C’est un outil qui renforce le lien avec chaque groupe de manière authentique et sensible, rendant le message plus percutant et véritablement engageant.
Qui plus est, cette approche réduit les temps et les coûts de production, tout en permettant aux directeurs artistiques de créer plus de variations ou d’adapter des campagnes en différents formats.

 

JUPDLC : Quels outils boostés à l’IA utilisez-vous actuellement au sein de votre agence ? Qu’est-ce que ceux-ci ont permis de changer ?

Jason Sellito : Nous exploitons une palette d’outils pour affiner nos processus créatifs. Midjourney reste essentiel pour l’idéation rapide et certains aspects de la production, tandis que des solutions plus spécialisées perfectionnent le travail visuel, de l’upscaling photographique à la déclinaison de formats.
Nous utilisons également des modèles de langage pour structurer et enrichir nos contenus, ce qui optimise la recherche et la rédaction tout en facilitant l’organisation des idées. En parallèle, des outils d’analyse nous aident à mieux comprendre les comportements des audiences et à ajuster nos messages en conséquence.
Notre approche est dynamique : nous testons constamment des solutions émergentes via des collaborations avec des start-up, notamment à Station F, pour mettre en place des workflows toujours plus efficaces. L’objectif est de permettre à nos clients de bénéficier des dernières évolutions technologiques.

 

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Crédit photo : Possessed Photography – unsplash

JUPDLC : En tant que Directeur de la création, comment imaginez-vous le futur du secteur d’ici 5, 10 ans ?

Jason Sellito : Je pense que la frontière entre créatif et technologie va progressivement s’effacer, rendant les créatifs de plus en plus interdisciplinaires. Nous aurons bien sûr des experts dans des médiums et secteurs d’activité spécifiques, mais la plupart d’entre nous encaisseront également la casquette d’experts en design génératif. Le développement de l’AGI représente également un tournant majeur dans un futur proche. Contrairement aux intelligences artificielles actuelles, spécialisées dans des tâches précises, l’AGI pourra comprendre, apprendre et s’adapter de manière plus holistique. Cela signifie que nous passerons d’une relation instrumentale avec l’IA à une collaboration beaucoup plus intuitive et créative.
Enfin, je vois aussi un retour à l’essentiel : plus l’IA se perfectionnera, plus la valeur ajoutée humaine – émotion, authenticité, sens – sera mise en avant. L’avenir ne sera pas une compétition entre l’humain et l’IA, mais une collaboration harmonieuse pour réinventer la manière dont les marques entrent en relation avec leurs publics.

Pour en savoir plus sur moonlike, rendez-vous sur sa page dédiée !

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