Cannes Lions 2025 : Entretien avec Raphaël De Andréis, Directeur Europe Havas

Par Léni Ronfard

18 juin 2025

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À l’occasion des Cannes Lions 2025 toute l’équipe de J’ai un pote dans la com, se mobilise pour vous faire vivre le festival comme si vous y étiez. Tout au long de la semaine, nous partons à la rencontre de personnalités issues du monde de la pub pour qu’elles nous partagent leurs insights sur cet événement phare, et leur vision des tendances qui façonnent – et façonneront ! – le secteur. Ces interviews réalisées avec le soutien de MEDIA FIGARO vous offriront une variété de regards et d’éclairages sur cette édition. 

Dans cet entretien, nous recevons Raphaël de Andréis, Président d’Havas en Europe continentale et chairman du réseau créatif dans plusieurs pays. Il partage avec nous sa vision des mutations du secteur, l’impact de l’intelligence artificielle sur les agences et ce qui fait, selon lui, la singularité du groupe Havas dans un écosystème publicitaire en pleine transformation.

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JUPDLC : Dans le monde de la publicité, on assiste à de profondes mutations. De votre point de vue, quelles sont les tendances les plus marquantes en 2025 ?

Raphaël: de Andréis : Je pense que la tendance la plus forte, et je ne vous apprendrai rien, c’est l’irruption de l’IA. Son impact est immense et il faut apprendre à le cadrer. Avec l’IA, tout le monde peut avoir 13 sur 20. Mais dans un monde hyper compétitif, ce dont les marques ont besoin, c’est d’agences capables de leur proposer du 19 sur 20.

C’est vertigineux car certaines agences n’y arriveront pas. D’autres, en revanche, joueront dans cette catégorie-là. À l’image des marques qui sont condamnées à l’excellence, nous aussi, agences, devons viser la Champions League de la créativité et de la stratégie. L’IA nous aide et nous pousse à cela : elle est capable de produire des choses de bon niveau, mais qui se ressemblent. À nous de rester singuliers.

JUPDLC :  Ces évolutions transforment-elles la manière dont les agences travaillent au quotidien ?

Raphaël: de Andréis : Oui, et c’est un vrai mouvement qu’on a engagé chez Havas ces dernières années. On est passé d’une logique d’offre — chaque agence allant voir son client avec son catalogue de services — à une logique de solution. On passe beaucoup plus de temps à écouter les marques pour comprendre leurs vrais problèmes.

Par exemple, si un client nous dit qu’il a du mal à connecter avec la Gen Z, on rentre à la maison et on réfléchit en solution, sans a priori : ça peut être un événement boosté sur les réseaux sociaux, du brand content, de l’influence… alors qu’avant, chacun serait arrivé avec sa spécialité sous le bras. C’est ça, le vrai changement de fond.

JUPDLC :  Cannes Lions est un moment fort pour les agences créatives. Qu’est-ce que ce festival représente pour un groupe comme Havas ?

Raphaël: de Andréis : Pour Havas, les Cannes Lions, c’est un peu notre Michelin à nous. On passe l’année à remplir le restaurant, mais là, pendant une semaine, le seul sujet c’est la qualité exceptionnelle du produit. C’est un moment où j’essaie de ne plus penser business et de me concentrer uniquement sur la créativité.

J’ai des souvenirs d’émotions extraordinaires, de coups de blues aussi, et je ne veux pas perdre ça. Cette année, c’est un no place to hide : on a un Lion ou on n’en a pas. Un Grand Prix ou on n’en a pas. Et ça, c’est à la fois enthousiasmant et un peu effrayant, comme au premier jour.


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JUPDLC :  Vous dirigez Havas en France et en Italie. Comment comparez-vous ces deux marchés en matière de créativité publicitaire et de tendances médias ?

Raphaël: de Andréis : Ce sont deux pays proches, mais assez différents. En matière de médias, l’Italie est encore plus sociale que la France. Il y a probablement des raisons sociologiques autour de l’esthétique, de la mise en avant de soi. Ils sont ultra connectés.


Côté créativité, la France a aujourd’hui un coup d’avance. Elle est devenue une grande nation de publicité grâce à des figures comme Jacques Séguéla ou Jean-Marie Dru. Le niveau est élevé. L’Italie mériterait mieux et c’est pour ça qu’on a fait venir Alasdhair Macgregor Hastie chez Havas Milan pour booster la création. En revanche, en design, les Italiens sont imbattables.

JUPDLC : Vous êtes également chairman du réseau créatif Havas en Allemagne, en Espagne et au Portugal. Quelles différences percevez-vous entre ces marchés ?

Raphaël: de Andréis : L’Allemagne est historiquement une grande nation créative, avec des agences comme Jung von Matt. Notre agence allemande est d’ailleurs régulièrement primée à Cannes.

L’Espagne est un pays qui aime la créativité et qui est challengé par l’Amérique du Sud, en particulier l’Argentine. On sent un réveil créatif en Espagne, et on vient justement de recruter un nouveau directeur de création pour accélérer encore.

Le Portugal a beaucoup d’envie, est aussi challengé par le Brésil, et même si le niveau global est correct, il n’est pas encore suffisamment visible à Cannes. On travaille à le faire monter.

JUPDLC : Selon vous, qu’est-ce qui fait la singularité d’Havas sur la scène créative aujourd’hui ? Existe-t-il une forme de “signature” Havas ?

Raphaël: de Andréis : Oui, notre ambition est que les campagnes qu’on présente à Cannes soient aussi populaires dans la rue. Le Graal, c’est d’avoir un Grand Prix à Cannes et un compliment de son chauffeur de taxi ou de sa grand-mère.
BETC, Havas Paris, Rosa et nos agences à l’international ont cette idée chevillée au corps : faire de la publicité qui touche les gens, qui s’inscrit dans le quotidien et qui reste. C’est cette culture qu’on défend partout.

JUPDLC :  Enfin, pouvez-vous nous citer une campagne qui vous a particulièrement marqué cette année ?

Raphaël: de Andréis : Alors ce n’est même pas une campagne de publicité à proprement parler, mais du design. Ce qu’a fait W Conrad Design pour le style des Jeux Olympiques est incroyable : une grammaire visuelle, symbolique et héraldique qui a rendu Paris plus chic et plus créatif.

J’ai aussi été impressionné par le travail réalisé pour LVMH autour des Jeux, avec Havas Play. Quand une campagne rend un événement objectivement meilleur et qu’on se dit qu’il lui manquerait quelque chose sans elle, on a atteint notre but. C’est ce genre de projet qui me fait me lever le matin.

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