Un partenariat qui fonctionne ? C’est le rêve de tout annonceur ou agence. Mais ce n’est pas toujours le cas ! En effet, une relation qui fonctionne comporte de nombreux prérequis. Confiance et partage sont par conséquent à la base de toute collaboration entre une agence et un annonceur. La réciprocité est également une valeur forte, qui permet de ne pas tomber dans une relation unilatérale et déséquilibrée.
En parlant de collaboration qui fonctionne, l’agence W Conran Design et Roland Garros en sont un bon exemple : un partenariat de 10 ans aux bases solides qui est passé par plusieurs grandes étapes. Tout d’abord, la transformation d’un stade historique qui tombait dans la vétusté par une équipe talentueuse et créative. L’objectif principal ? Donner du sens tout en renouvelant l’image de marque de Roland Garros, en répondant aux diverses attentes des publics. Le tout, en s’assurant que la stratégie soit pérenne et tournée vers l’avenir, en exploitant le potentiel d’un lieu exceptionnel. Pour en parler, nous avons rencontré Gilles Deléris, Directeur de la création et cofondateur de W Conran Design.
JUPDLC : Depuis combien de temps votre collaboration avec Roland Garros est-elle effective ? Comment avez-vous été amenés à travailler ensemble ?
Gilles Deléris : Cela fait près de 10 ans que l’aventure Roland Garros a débuté. La FFT – Fédération Française de Tennis – a lancé un appel d’offres pour accompagner la transformation du Stade alors que de grands projets architecturaux étaient en cours. Mais hormis le talent des architectes, rien ne reliait les projets entre eux. Le pitch portait donc sur la capacité d’une agence à imaginer le récit partagé sur l’ensemble de l’emprise de ce tournoi majeur.
JUPDLC : Quels sont les différents enjeux de cette collaboration ?
Gilles Deléris : J’en vois au moins trois :
Le premier consistait à ce que Roland Garros affirme son statut de tournoi du Grand Chelem. La concurrence internationale est rude et ce statut n’est jamais définitivement acquis. Or, l’actif de cette marque est absolument central pour la FFT. Il s’agissait donc de la vitaliser et de la faire rayonner en France et hors de nos frontières.
Le second consistait à repenser les parcours de tous les publics – joueurs, accompagnants des joueurs, presse, publics, … – en upgradant sensiblement les expériences. Roland Garros était un stade vieillissant victime de son succès. Il a fallu repenser toutes les logiques d’accueil, d’hospitalité, de restauration, de boutiques, de confort, de signalétique en adéquation avec les attentes de tous ces publics.
Le troisième enjeu est celui de la cohérence et de la pérennité d’un tel projet dont nous savions qu’il serait mené sur plusieurs années.
JUPDLC : Selon vous, qu’est-ce qui a fait le succès de ce partenariat ?
Gilles Deléris : Votre question fait écho au point qui précède. Il faut beaucoup de constance et de détermination pour tenir une ligne créative sur autant de temps. Il faut une vraie permanence des équipes créatives menées par Samuel Dubech, par la maîtrise d’œuvre d’exécution et par les équipes conseil qui sont globalement restées à bord tout au long du projet et qui le sont encore aujourd‘hui. Ne pas perdre le fil rouge sur toutes ces années, c’est un vrai savoir-faire de W, comme c’est le cas pour le travail que nous menons sur les Jeux Olympiques et Paralympiques.
JUPDLC : Sur votre site internet, vous parlez de vétusté du stade, en amont de cette collaboration. Pouvez-vous nous la décrire ?
Gilles Deléris : Comme tout équipement qui accueille des centaines de milliers de personnes sur plusieurs années, bien des choses deviennent obsolètes ou désuètes. Rien d’anormal à cela. Mais une des difficultés du Stade résidait en ce que de nombreuses transformations et/ou évolutions successives avaient fini par rendre les circulations complexes, les allées encombrées de mobiliers temporaires sans qualité, de zones de restauration mal dimensionnées, d’accueils inégaux, d’un village qui n’était pas aux standards internationaux. C’est tout cela qui a été reconsidéré.
JUPDLC : Sur quels éléments concrets a travaillé l’agence pour renouveler l’offre globale proposée par Roland Garros ?
Gilles Deléris : Beaucoup de chantiers ont été menés de front en collaboration étroite avec les différents acteurs de cette transformation. Nous avons déployé tout le langage de marque dans tous les espaces en associant branding, information et muséographie, nous avons redéfini toute la signalétique et le mobilier associé, nous avons créé une quinzaine de boutiques dont un flagship de 3000m2.
Nous avons également créé 4 restaurants adaptés aux différents niveaux de gamme, nous avons dessiné avec les architectes les sièges du central, réalisés en bois (ce qui est unique), nous avons travaillé sur les salons des sponsors, sur un grand espace VIP et plus récemment encore, nous avons redessiné le mobilier des courts, révélés lors de ce tournoi 2024 et l’allée du tennis français, un spectaculaire parcours en l’honneur des héros de ce sport depuis 1890 jusqu’à aujourd’hui.
JUPDLC : Selon vous, quels sont les ingrédients les plus importants dans une relation entre agence et annonceur ?
Gilles Deléris : On danse le tango à deux. Vous connaissez la formule. Quand nos clients ont de l’ambition et qu’ils nous poussent dans nos retranchements, pas dans les leurs, les conditions sont réunies pour bien travailler. Cette exigence bienveillante est la donnée clé d’une relation de confiance et de réciprocité. Et je le disais plus haut, la constance en est une autre.
Nous avons survécu à trois présidents de la FFT. À chaque fois nous avons réexpliqué le projet, à chaque fois, nous avons été entendus grâce aussi au soutien permanent de Gilles Jourdan qui a mené de projet de bout en bout avec une autorité remarquable. Et je finis par un point qui peut aussi compter : nos équipes ont du talent, elles considèrent la création comme un actif immatériel majeur et mettent tout en œuvre pour la mettre en musique. Mais ce ne serait pas à moi de le dire.
JUPDLC : Vous avez conçu une structure spéciale, en hommage aux joueurs de tennis français. Pouvez-vous nous en parler ?
Gilles Deléris : C’est le Walk of Fame dont je parlais plus haut. Il célèbre les joueurs français qui ont marqué l’histoire de ce sport. C’est une série de 15 arches qui énumèrent au fil des décennies les finalistes et les vainqueurs français tous tournois confondus. C’est l’hommage qui manquait dans ce stade, véritable épicentre de ce sport, et qui sera visible dès le tournoi de cette année et donc lors de Paris 2024. On y découvre des sportifs français valides et para qui ont des palmarès inouïs. C’est une façon étonnante de traverser les décennies.
JUPDLC : Comment êtes-vous parvenus à prendre en compte les différents objectifs RSE au sein de votre collaboration ? Quels sont-ils ?
Gilles Deléris : D’une part, nos activités sont de plus en plus soumises à des normes environnementales qui nous vont bien. Dans notre matériauthèque sont référencés un très grand nombre de matériaux qui y répondent. Mais ce qui nous guide se passe dès la conception. L’exemple sans doute le plus éloquent est celui que nous avons mené sur les sièges du Philippe Chatrier (et sur le Suzanne Lenglen et Simone Matthieu) et tout récemment sur le mobilier des courts.
La dimension RSE s’est imposée d’emblée en optant pour le bois. Celui-ci est issu d’une forêt des Vosges, la fabrication est française et répond dans les deux cas à des normes strictes. Mais ce choix est aussi celui d’une esthétique en cohérence avec les intentions générales du projet installé au cœur du Bois de Boulogne, pour un tournoi de plein air où la nature s’impose d’elle-même. C’est ce jardin Bleu-Blanc-Terre que nous avons imaginé et qui se développe harmonieusement depuis 10 ans.
JUPDLC : Quels conseils donneriez-vous à un annonceur sportif qui souhaiterait créer des expériences Premium ?
Gilles Deléris : L’expérience client, c’est une histoire d’écoute et de vision. L’écoute permet d’entendre ce qui fait défaut, où sont les douleurs du parcours et permet de proposer des résolutions opérantes. La vision consiste à faire autorité et à embarquer son public dans un récit qui le transporte. Dès lors, il faut savoir articuler le temps long de la vision (et s’y tenir) et le temps court des victoires rapides qui viennent solutionner les points de frictions négatives.
Le risque, en particulier dans l’imaginaire du sport, consiste à négliger le temps long. Celui de la pérennité de la marque, de ses fondamentaux. On risque de penser exploit de l’instant et, l’un chassant l’autre, de perdre le fil de l’histoire. C’est une clé de ce qui nous a réussis à Roland Garros.
JUPDLC : Maintenant que l’identité visuelle, le brand design ou encore la signalétique de Roland Garros ont été repensés, quelles sont les prochaines étapes de cette collaboration ? Quels objectifs à plus ou moins long terme ?
Gilles Deléris : La FFT mène beaucoup d’initiatives de dynamisation de cet équipement exceptionnel. Alors qu’il y a 10 ans l’activité du stade était essentiellement concentrée sur la période du tournoi, le lieu est désormais beaucoup plus exploité à la faveur de nouvelles activités, de nouveaux sports comme le paddle, qui prend de plus en plus d’ampleur ou d’activités variées d’entertainment. Cela nous donnera je l’espère encore beaucoup de grain à moudre !
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