Quel avenir pour Facebook ?

Enn collaboration avec SUP'DE COM
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Alors que ce mardi 28 février est associé à la Journée mondiale sans Facebook, nous nous interrogeons sur l’avenir de ce réseau social. Créé en 2004 – et accessible à tous depuis 2006 – il s’est vite imposé comme un acteur prépondérant. Véritable mastodonte du fait de son nombre d’utilisateurs et de sa capacité d’influence dans la sphère publique, Facebook a su développer diverses fonctionnalités au fil du temps, tandis que l’empire des médias sociaux continuait de se développer en parallèle. Néanmoins, il semblerait que la plateforme soit dorénavant en perte de vitesse…

En effet, Facebook, qui appartient à Meta, a enregistré la première baisse d’utilisateurs de son histoire lors du dernier trimestre 2021, avec une perte considérable de 4 millions d’usagers quotidiens. Face à ce constat, la question qui subsiste est celle de l’avenir de Facebook : le réseau social va-t-il continuer à perdre de la vitesse jusqu’à finalement s’éteindre ? Ou bien, au contraire, le réseau social parviendra-t-il à tirer son épingle du jeu et à se réinventer ? Pour répondre à ces questions, nous avons rencontré Louison Grouard, Dirigeante de Pawan (agence de communication digitale) et intervenante sur le campus SUP’DE COM de Nantes, ainsi que Pierre Seillier, Head of Marketing chez Agorapulse.

 

Entretien avec Louison Grouard (agence Pawan et école SUP’DE COM)

JUPDLC : Commençons par dresser un état des lieux des réseaux sociaux aujourd’hui. Quels sont les usages (B2B et B2C) qui prédominent ? Quelle place ces médias ont-ils prise dans nos vies ? Quels sont les réseaux sociaux les plus utilisés ?

Louison Grouard : Aujourd’hui, Facebook reste le réseau social le plus utilisé en France : 3 Français sur 4 l’utilisent régulièrement. Il perd des utilisateurs parmi les moins de 18 ans, mais continue d’en gagner chez les plus âgés. Instagram n’arrive pas loin derrière, avec un peu moins de 1 Français sur 2 qui l’utilise. De son côté, TikTok était utilisé par 1 Français sur 4 au moins une fois par mois en 2022.

En ce qui concerne les réseaux B2B, LinkedIn totalisait 25 millions de membres en France fin novembre 2022, ce qui représente 80% de la population active. Sur le papier, Facebook reste donc LE poids lourd des réseaux sociaux en France. Maintenant, si on s’intéresse aux usages, l’on constate de fortes nuances entre ces réseaux, ce qui peut nous faire dire que Facebook est en perte de vitesse.

TikTok, par exemple, a une très forte capacité de rétention : en 2022, chaque utilisateur y passait en moyenne 1h30 par jour ! C’est presque 2 fois plus que sur Facebook et Instagram qui totalisent environ 50mn.

 

JUPDLC : Selon une récente étude d’Agorapulse, Facebook reste le réseau social le plus utilisé par les agences en 2022. Pour preuve : sur l’ensemble de leurs posts en France, 1 sur 2 est publié sur Facebook. Est-ce votre cas ? Quel rapport entretenez-vous avec cette plateforme ?

Louison Grouard : Au sein de l’agence Pawan, c’est un peu différent ! Nous avons pas mal de clients en B2B. En community management organique, on travaille donc davantage sur LinkedIn.

Pour nos clients en B2C qui utilisent toujours Facebook, la plupart du temps en complément d’Instagram, on remarque une baisse significative de l’engagement d’années en années. Il devient vraiment difficile de tirer son épingle du jeu en tant que Page, de gagner des abonnés, et des interactions.

En revanche, même pour nos clients B2B, la publicité sur Facebook est un excellent outil. Généralement, nous leur conseillons de mettre en place une stratégie de retargeting bien ciblée, sur Facebook et Instagram, ce qui fonctionne très bien !

 

JUPDLC : Comment votre agence de communication digitale Pawan perçoit-elle l’évolution de Facebook en termes de stratégie marketing pour les marques ? Recommandez-vous à vos clients – tout comme aux étudiants de SUP’DE COM – d’intégrer Facebook dans leur stratégie de communication aujourd’hui ?

Louison Grouard : Chez Pawan, nous plaçons les réseaux sociaux au cœur de la stratégie marketing des entreprises. Et pour nous, toute stratégie doit partir de deux choses : votre cible et vos objectifs.

Si votre cible n’a pas moins de 30 ans, et que vous avez un objectif de notoriété, de trafic ou de ventes : Facebook reste un outil très puissant, et l’on ne peut vous conseiller que de foncer ! Contrairement à TikTok, qui est surtout pertinent pour travailler la notoriété d’une marque, Facebook fait vendre.

En revanche, ne faites pas l’erreur de penser qu’une stratégie 100% organique fera décoller vos ventes en 2023. Pour moi, la complémentarité entre le community management et les Facebook Ads, notamment via le retargeting et les audiences LookAlike est évidente.

Donc oui, continuez d’intégrer Facebook à votre stratégie marketing. Mais ayez une vision macro de vos actions, en associant tous les leviers entre eux : community management, retargeting, LookAlike, UX sur votre site web et tunnel d’acquisition.

 

JUPDLC : Néanmoins, en termes de popularité, Facebook décline. Il séduit de moins en moins les jeunes générations. Cette perte de vitesse va-t-elle perdurer, selon vous ? Facebook va-t-il disparaître dans les prochaines années ?

Louison Grouard : Oui, je pense que Facebook va continuer à perdre de la vitesse. Je donne beaucoup de cours en écoles supérieures, et je me rends compte que, chez les 1ères années post-bac, presque aucun étudiant n’a de compte Facebook. En 2022, seuls 15% des utilisateurs avaient moins de 24 ans.

Les plus jeunes ne comprennent pas ce réseau, le trouvent trop dense, ou trouvent qu’il comprend trop de fonctionnalités… Il faut dire que Facebook a initialement été pensé pour l’ordinateur, là où tous les autres réseaux sociaux ont été conçus pour être utilisés sur smartphone, ce qui les rend donc bien plus simples.

Cependant, j’ai du mal à voir Facebook disparaître dans les 5 ou 10 prochaines années. Même si les utilisateurs partagent moins de contenus via leurs profils, les fonctionnalités comme les événements ou les groupes fonctionnent encore bien. Si je regarde bien dans ma boule de cristal, je vois des développements du côté de Marketplace, avec peut-être plus d’espaces pour les boutiques en ligne…

 

JUPDLC : Peut-on encore être créatif sur Facebook ? Quels conseils délivrez-vous aux étudiants de SUP’DE COM pour le rester ?

Louison Grouard : C’est indéniablement plus compliqué d’être créatif sur Facebook que sur Instagram, Pinterest ou TikTok, où le visuel est roi… Mais ce n’est pas impossible !

Je conseillerais de commencer par effectuer une veille sur la concurrence et de s’inspirer des meilleurs. Comme je le dis tout le temps : « Copy the best, invent the rest ». Le second conseil serait de faire un tour d’horizon des fonctionnalités (albums photos, stories, groupes, évènements, vidéos…) et de lister, point par point, ce que l’on pourrait faire pour sortir du lot sur chacune d’entre elles.

Par exemple, les groupes pour parler d’un sujet relatif à notre marque fonctionnent très bien. J’ai en tête le groupe Facebook de la boutique Henné Paradise, qui comptabilise plus de 30.000 membres (près du triple des fans de sa Page), et qui comprend quasi exclusivement des clientes ravies, qui se sont, depuis, transformées en véritables ambassadrices de la marque.

 

JUPDLC : Quels contenus fonctionnent le mieux ?

Louison Grouard : Je conseille à mes clients d’alterner entre des posts « légers » et des posts « informatifs », mais toujours dans l’objectif d’apporter du contenu de valeur à leur cible : conseils, astuces, tutos, divertissement… Du côté des fonctionnalités, les Réels ne sont pas à négliger sur Facebook, qui se porte de plus en plus vers le snack content. Et un dernier conseil : mieux vaut oublier les liens qui redirigent vers votre site web, qui sont blacklistés par l’algorithme !

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Crédit photo : Adobe Stock / Brad Pict

 

JUPDLC : L’avenir de Facebook est-il dans le metaverse ? Quelle est – et sera – sa place dans la révolution du Web3 ?

Louison Grouard : La question divise… Entre ceux qui pensent que c’est inévitable, ceux qui trouvent que ce serait un désastre social et ceux qui croient que les ressources énergétiques ne le permettent tout simplement pas…

N’oublions pas non plus la crise que traversent aujourd’hui les entreprises de la Tech. Meta vient de boucler une grosse vague de licenciements; et 10 à 15% des salariés ont ainsi quitté le navire fin 2022… Ils disposent donc de moins de ressources pour développer le Metaverse !

On a énormément parlé du Metaverse début 2022, avec des perspectives très intéressantes : divertissement, formations à distance, jeux, univers superbes, et surtout gigantesque terrain de jeux pour les annonceurs… Mais on en parle beaucoup moins aujourd’hui, avec par exemple de premiers aperçus décevants d’Horizon Worlds.

Je dirais que tout est à définir dans les mois à venir : soit la plateforme arrive à proposer des solutions attrayantes ; soit les contraintes de design, de prix, et d’impact écologique restent trop importantes, et le Metaverse ne trouvera pas son public. Aujourd’hui, j’ai plutôt tendance à pencher pour la seconde option.

 

JUPDLC : Comment vivez-vous cette journée mondiale sans Facebook ?

Louison Grouard : Je vais vous faire une confidence : à titre personnel, je suis à deux doigts de désinstaller Facebook, que je n’utilise plus que pour Messenger. Alors je vis cette journée plutôt bien, et je vais de ce pas ouvrir LinkedIn !

 

Une interview complétée par l’avis de Pierre Seillier, Head of Marketing chez Agorapulse.

Podcast


Entrevue avec Pierre Seillier (solution Agorapulse)

JUPDLC : Et si le marché des réseaux sociaux était en pleine restructuration ? Tel est le titre d’un de vos récents articles. Pouvez-vous nous en parler et nous préciser comment vous en êtes venu à vous poser cette question ?

Pierre Seillier : Depuis plusieurs années, on assiste à une consolidation de plusieurs réseaux sociaux, et on fait face à une accumulation de faits qui interroge.

L’histoire commence là où on ne l’attendait pas, c’est-à-dire au moment où Google rachète Youtube pour 1,65 milliard de dollars en octobre 2006. Il faudra attendre ensuite 6 ans pour que l’histoire se poursuive, le 9 avril 2012, lorsque Facebook achète Instagram pour un milliard de dollars. Puis, début mai de la même année, Facebook fait l’acquisition de la start-up Glancee, plateforme de découverte sociale.

En février 2014, Facebook annonce ensuite l’acquisition de WhatsApp pour 21,9 milliards de dollars. En 2016, c’est au tour de Microsoft d’acheter LinkedIn pour 26,2 milliards de dollars. Vient ensuite le tour de ByteDance qui lance TikTok en 2017, la version de Douyin pour les marchés situés hors de Chine. Le 9 novembre 2017, ByteDance acquiert son concurrent chinois, Musical.ly, pour près d’un milliard de dollars. Le 2 août 2018, l’entreprise fusionne les deux applications, tout en conservant le nom de TikTok. Enfin, en 2022, après des mois de négociations, Elon Musk rachète Twitter…

C’est un fait : le marché des réseaux sociaux est familier des rapprochements et des consolidations en tout genre ! On peut donc se demander si on ne fait pas face à une accélération des consolidations, qui sont de plus en plus fréquentes, à mesure que le temps passe. On peut également se demander qui sera la prochaine victime ? BeReal ? Facebook ? Seul l’avenir nous le dira !

 

JUPDLC : Beaucoup considèrent Facebook comme obsolète, ringard. Le désintérêt – notamment des jeunes générations – est croissant. Et pourtant ! Ce réseau social reste paradoxalement la plateforme sociale la plus utilisée au monde : c’est un incontournable. Pourquoi ?

Pierre Seillier : Effectivement, c’est assez paradoxal, on entend dire que Facebook est de moins en moins utilisé par les jeunes mais, dans le même temps, on s’aperçoit que Facebook reste la plateforme la plus utilisée au monde avec un peu moins de 3 milliards d’utilisateurs actifs. Une récente étude a même montré que malgré la récente baisse des utilisateurs mensuels sur le réseau social, la base d’utilisateurs actifs de Facebook a été multipliée par plus de 10.

En fait, Facebook reste incontournable pour plusieurs raisons. D’abord, en raison de l’histoire : c’est l’un des réseaux sociaux les plus anciens du marché, et il dispose donc, du fait de son ancienneté, d’une solide base d’utilisateurs. Ensuite, Facebook a « vieilli » : lors de son lancement en 2004, la plateforme n’était utilisée que par les jeunes, notamment les étudiants américains. Puis, leurs parents sont venus, par curiosité, afin de découvrir ce réseau social dont leur parlaient leurs enfants. Ils l’ont adopté à leur tour, ce qui a entraîné un vieillissement de l’audience de Facebook… Le réseau social n’attire donc plus forcément les jeunes mais il attire les autres tranches d’âge !

Par ailleurs, en dépit de ce que l’on croit, Facebook se transforme. L’évolution défensive de Meta, qui a copié le format vertical de TikTok, a fonctionné. Ils ont désormais les données pour montrer que les Reels plaisent aux utilisateurs Instagram. Même si les résultats financiers ne sont pas immédiatement visibles, ils vont arriver.

 

JUPDLC : Les jeunes délaissent-ils vraiment ce réseau social ? Qui sont les utilisateurs de Facebook aujourd’hui ?

Pierre Seillier : On le disait, les utilisateurs de Facebook ont vieilli. Une étude Digimind de 2021 montrait d’ailleurs que près de 60% ont plus de 35 ans. Néanmoins, il faut noter que les 25-34 ans représentent 25% des utilisateurs. Si on ajoute à cette tranche celle des 18-24 ans, on obtient 39% des utilisateurs de Facebook.

Pour résumer, si on caricature, 40% ont moins de 35 ans et 60% ont plus de 35 ans.

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Source : Étude Soprism / Crédit photo : Digimind

 

JUPDLC : Dans ce contexte, Facebook demeure-t-il pertinent pour les marques ? Pour générer des leads ?

Pierre Seillier : En fait, tout dépend de qui l’on cible et des objectifs que l’on espère obtenir. Si une marque cible le grand public, et qu’elle estime que son persona utilise Facebook, alors elle se doit d’y être présente.

Ensuite, une fois que la présence est validée, il y a plusieurs stratégies possibles qui, chacune, dépendent des objectifs poursuivis : Si l’on cherche uniquement à être présent et visible, la marque peut par exemple alimenter une page Facebook avec des posts organiques. Si l’objectif est de créer de l’engagement, la marque peut alors utiliser les publicités ciblées ou le retargeting.

Pour les marques e-commerce, le réseau social offre la possibilité de créer des boutiques pour vendre sur Facebook directement, ou de faire de la publicité Facebook qui permet de cibler avec précision son audience. Et, je le rappelle, l’évolution défensive de Meta, qui a copié le format vertical de TikTok, a fonctionné.

Facebook propose aussi des formats publicitaires innovants comme les pubs click to message (Publicité avec redirection Messenger ou Whatsapp). Ces pubs permettent aux utilisateurs de rester dans l’écosystème d’app Meta, et ainsi de simplifier l’expérience utilisateur. À noter que ces pubs représentent un revenu annuel de 10 milliards de dollars pour Meta.

 

JUPDLC : Quelles sont les tendances annoncées pour 2023 sur Facebook ?

Pierre Seillier : Il y a plusieurs tendances selon moi. D’abord, Facebook a déjà confirmé son intention de doubler le flux d’actualités au sein de la section « Accueil ». L’idée est de fournir un contenu en adéquation avec nos préférences (goûts, commentaires et interactions).

Par ailleurs, comme pour les autres réseaux sociaux, la vidéo va voir sa part augmenter sur Facebook. On voit la place prise par Facebook Live depuis 2019. Cet outil permet aux entreprises de raconter leur histoire sans filtre et de montrer ce qui se passe réellement à l’intérieur. C’est certain, la place de la vidéo sur Facebook continuera de s’amplifier.

 

JUPDLC : 10 campagnes Facebook figurent dans le Livre Blanc d’Agorapulse x J’ai un pote dans la com, dédié aux meilleures campagnes social media de 2022. L’une d’elles a-t-elle particulièrement retenu votre attention ?

Pierre Seillier : Incontestablement, je répondrais la campagne #DétoxifieTonFil de Dove : créée par Dove, en partenariat avec plusieurs psychologues spécialistes en estime de soi, l’initiative #DétoxifieTonFil vise à mettre en lumière la nature insidieuse et toxique de certains conseils beauté relayés sur les réseaux sociaux.

Dove voit les choses en grand pour cette campagne. La marque mène ici un vrai projet documentaire, avec l’utilisation de l’intelligence artificielle. On est happé par le storytelling : en faisant la rencontre des duos mère-fille et en comprenant le projet, on a envie de connaître l’issue de leur discussion. Cette initiative, en plus de permettre à Dove de créer ses propres hashtags de marque, surfe sur la vague du mouvement Body Positive, part importante de l’image de marque de Dove. Facebook constitue un réseau social de choix pour cette campagne, en ce qu’il rassemble encore, du moins pour quelques années, plusieurs générations sur sa plateforme.

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Crédit photo : Dove

 

JUPDLC : Comment vivez-vous cette journée mondiale sans Facebook ?

Pierre Seillier : Avec Agorapulse, on a décidé de la vivre pleinement. Nous jouons le jeu et d’ailleurs notre seul post aujourd’hui est un écran noir accompagné d’un post-contextuel. Clairement, ce ne sera pas un de nos meilleurs jours en termes de performances sur Facebook !

 

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