FOOH : une tendance publicitaire qui défie la réalité

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Le « faux » devient viral ! Difficile de passer à côté du sujet brûlant du Fake Out Of Home (ou FOOH) qui bouscule les codes du street marketing et transforme, de façon plus générale, le paysage publicitaire à coups de réalité augmentée, d’effets spéciaux et d’images générées par ordinateur (ou CGI). Les plus grandes marques s’y sont mises ! Et pour cause : cette publicité en plein air virtuelle captive et engage les audiences. Elle est plus impactante et plus conversationnelle, tout en étant moins coûteuse qu’une opération réelle. Néanmoins, cette pratique du « faire semblant » soulève aussi de nombreuses questions. Décryptage.

 

Partie 1 : Comprendre le phénomène FOOH
Partie 2 : 10 exemples marquants « qui font semblant »
Partie 3 : Face aux risques et critiques du FOOH, la prudence est de mise
Partie 4 : L’avenir du FOOH dans le marketing
Partie 5 : Pour aller plus loin, nous en avons discuté avec des pros !

 

Comprendre le phénomène FOOH

Une tendance virale, entre innovation et illusion

La créativité publicitaire ne cesse de se réinventer, c’est un fait. La dernière approche novatrice en date ? Le Fake Out Of Home. Celui-ci est apparu en réponse à l’évolution rapide des technologies numériques et de la consommation des médias dans notre société de l’immédiateté et du snack content. Profitant de la popularité croissante de la réalité augmentée, de la 3D, de l’intelligence artificielle et des autres effets spéciaux dans la publicité, le FOOH a commencé à émerger comme un moyen innovant de capter l’attention des consommateurs, à l’heure où toutes nos expériences sont affichées en ligne.

Mais de quoi s’agit-il exactement ? Ce sont des vidéos hyperréalistes et hyperimmersives – diffusées en général sur les réseaux sociaux comme Instagram ou TikTok – dans lesquelles apparaît une activation OOH (Out Of Home) impressionnante. Celle-ci se tient généralement dans un paysage urbain ou à proximité d’un monument célèbre. L’objectif ? Surprendre, susciter l’enthousiasme et provoquer des réactions comme « c’est trop beau pour être vrai » ou « c’est réel ???! ». Et justement non ! Contrairement au OOH ou au DOOH (Digital Out Of Home), le FOOH crée l’illusion de la réalité, au point de faire douter les Internautes. Et plus cette « illusion » est parfaite et surprenante, plus le buzz est réel et puissant !

Ainsi, le FOOH permet de créer des expériences publicitaires originales, sans les contraintes physiques des campagnes traditionnelles. Toutefois, étant un phénomène relativement nouveau, son développement et son adoption sont toujours en cours. Le FOOH continue d’évoluer, avec de nouvelles techniques. De nouvelles approches sont constamment explorées pour maximiser son impact et son efficacité.

 

Les forces du FOOH

Le Fake Out Of Home offre une série d’avantages par rapport à la publicité extérieure classique ou le street marketing. En voici une liste non exhaustive :

  • Une créativité sans limite : en mêlant réalité et illusion, les possibilités sont multiples. De plus, cette forme publicitaire hyperimmersive permet d’adopter un storytelling « plus léger » et impactant. Les créatifs sont attirés par le FOOH car il offre la possibilité de (se) raconter autrement, sans les contraintes apparentes de lieu, de disponibilité… Et tout ça avec en toile de fond notre réalité et des éléments personnalisables.
  • Un format court : cette production s’aligne aux tendances du snack content et du short video content, particulièrement attendues sur les réseaux sociaux. Les utilisateurs affichent en effet une préférence pour les formats concis, visuels et qui « accrochent » dès les premières secondes.
  • Ça plaît : alors que l’attention est autant plébiscitée que limitée, le Fake Out Of Home permet de la capturer instantanément. Les utilisateurs des réseaux sociaux s’arrêtent pour regarder la « magie » opérée. Parfois l’illusion est telle qu’ils n’arrivent pas à discerner le vrai du faux. Alors ils s’interrogent, aiment, commentent, partagent… L’engagement est fort ! Ce format est aussi populaire car il crée un lien émotionnel avec le public. Et si ça séduit les internautes, ça plaît aussi aux algorithmes des réseaux sociaux qui vont naturellement pousser ces contenus.
  • Ça buzz : le potentiel de viralité est donc indéniable. En effet, en raison des arguments précédemment évoqués, les vidéos de ce type ont plus de chances d’atteindre un large public, de façon entièrement organique (reach organique). Ce qui n’est pas négligeable.
  • Des économies financières : cette méthode est plus économique qu’une publicité extérieure classique dans le sens où elle permet d’éviter certains coûts (de production, d’affichage physique, de location d’emplacements, de tournages, de permis de construction…). Précisons que les créateurs à l’origine de ses publicités doivent se plier aux mêmes règles que les photographes ou vidéastes en termes d’autorisations et de droits d’utilisation.

 

11 exemples marquants « qui font semblant »

Au-delà de la qualité des effets spéciaux, de la 3D, de la réalité augmentée et des images générées par ordinateur ; une mention spéciale s’impose pour le jeu d’acteur des personnes présentes sur les vidéos.

1. Des sacs Jacquemus XXL envahissent les rues de Paris

En avril dernier, Jacquemus a fait le buzz sur Instagram avec une vidéo montrant des sacs Bambino géants… et « turbo diesel » ! En effet, les créations semblaient « rouler » dans les rues de la capitale parisienne, devant l’Opéra Garnier, comme des taxis. Une campagne de « street marketing virtuelle » originale qui a fait douter les internautes ! Réalisée en 3D, celle-ci est signée Ian Padgham, Vidéaste et Fondateur du studio Origiful.

 

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2. Maybelline maquille les métros et les bus londoniens !

Un métro et un bus ont arboré des cils géants en plein cœur de Londres, en juillet. Ils ont ensuite été maquillés par une brosse de mascara « Sky High » de la marque de cosmétique. Une activation impressionnante, que beaucoup ont cherché à voir en vrai… en vain. Celle-ci n’existe pas en dehors des réseaux sociaux. Là encore, c’est Ian Padgham qui a accompagné l’équipe marketing de Maybelline.

 

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3. North Face couvre Big Ben

Le temps d’une vidéo publiée sur TikTok en novembre, JD Sports transforme le célèbre monument Big Ben en mannequin The North Face. Celui-ci revêt en effet une doudoune jaune géante de la marque. Inutile de préciser que la vidéo a fait le buzz. Beaucoup y ont cru (au point de critiquer cette « installation ») ! Il faut dire que la foule de spectateurs émerveillés et les phrases du style « C’est fou » et « il faudrait prendre une photo de ça » sont très convaincants.

 

@jdofficial Have I just seen Big Ben wearing a Northy? #JDSports #JD #TheNorthFace #London #Streetwear #TNF #FYP ♬ original sound – JD Sports

 

4. L’Oréal Paris repeint la ville en rouge (à lèvres)

Afin de promouvoir son Infaillible Matte Resistance liquid lipstick, en septembre, L’Oréal Paris a misé sur une mise en scène bien particulière. On y voit en effet un rouge à lèvres géant, sur le toit d’une 2 CV qui traverse Paris. Outre sa taille, sa particularité est aussi de peindre la chaussée. Une opération créée de toutes pièces par ordinateur, dont la vidéo a cumulé plus de trois millions de vues en moins de 2 jours !

 

@lorealparis Fasten your seatbelts, Infaillible Matte Resistance is here 💄#LOrealParis #MatteResistance #makeup ♬ original sound – L’Oréal Paris

 

5. Napoléon s’affiche à l’Arc de Triomphe

Pour promouvoir la sortie en salle de Napoléon (le 22 novembre dernier), Sony Pictures et son agence Busterwood ont vu les choses en grand ! Ils ont en effet déroulé une affiche XXL du film sur l’Arc de Triomphe, un édifice de renom construit sous le règne de l’empereur. Cette activation visible qu’à travers un téléphone, a conquis le public. La vidéo compte en effet des millions des vues et des milliers de réactions positives à travers le monde.

 

6. Les « dominos » de la Philharmonie du Luxembourg

La Philharmonie est le premier annonceur à se prêter au jeu au Luxembourg, en novembre dernier, afin de promouvoir ses « Music Box ». Pour l’occasion, elle fait confiance au Studio Polenta et FOREAL. Le décor ? Kirchberg, le quartier d’affaires luxembourgeois. La vidéo montre ainsi d’énormes coffrets cadeaux, tomber à la suite – tels des dominos – sur le parvis de la Philharmonie. Ce qui rend la vidéo « réaliste » est le bruit assourdissant qui accompagne ces chutes !

 

7. La console de Playstation remplace la Tour Montparnasse

Il y a quelques semaines, Playstation dévoilait sur son Instagram une transformation ambitieuse : la Tour Montparnasse prenait l’apparence d’une console géante. Une activation ingénieuse pour les fêtes de fin d’année qui n’a pas manqué de faire sourire les amateurs de jeux vidéo. Et la vidéo a d’autant plus marché (et créé le doute), qu’elle s’appuie sur deux prises de vues réelles. Notons qu’aujourd’hui, elle cumule plus de 13 600 likes sur le réseau social mentionné.

 

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8. Barbie sort de sa boîte à Dubaï

Les coups marketing de génie autour du film Barbie sont nombreux. Et parmi eux figure une vidéo d’Eye studio montrant une poupée de plus de 10 mètres, sortir de sa boîte rose Mattel, à proximité du Burj Khalifa, à Dubaï. Ce contenu – qui a nécessité 10 jours de travail – n’a pas manqué de bluffer les internautes. D’ailleurs, il ne paraissait pas si irréaliste que ça après les multiples activations grandioses pour promouvoir le film de Greta Gerwig avec Margot Robbie.

 

9. Lever de rideau pour ETAM

Pour son Live Shows 2023 (le 26 septembre dernier), placé sous le signe de la fête, ETAM a ressuscité le plus mythique des night-clubs parisiens et convié ses spectateurs à revivre l’effervescence des années 80. Une invitation qu’elle a notamment partagée à travers une vidéo montrant la façade du « Palace » recouverte d’un immense rideau à frange argenté et agité. Une idée imaginée et réalisée par l’agence Vokode.

 

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10. Les photos de Xiaomi défilent

Cette activation automnale mêle réalité et 3D, au niveau d’un arrêt de bus JCDecaux. On y voit un print se déroulait à l’infini, à la manière d’une galerie photos de téléphone. L’idée ? Promouvoir le nouveau Xiaomi 13T, co-conçu avec Leica, capable de prendre de superbes clichés mais aussi de les stocker. Notons que cette opération, signée Socialclub, s’inscrit dans une campagne globale (films, prints, événement, influence…).

 

11. #SantéÉgalitéPriorité avec Withings

Le 8 mars dernier, Withings et l’agence The Sun Project ont lancé une initiative audacieuse et engagée, qui a marqué la Journée du Droit des Femmes. L’idée ? Recourir au FOOH pour sensibiliser le plus grand nombre aux inégalités de diagnostic des risques cardiovasculaires. Withings a ainsi partagé une vidéo frappante. Des statues de femmes, symboles de personnalités fortes et puissantes, se dissipent dans un nuage de cendres. Et un message fort : 200 femmes en France meurent chaque jour dans l’indifférence. Une manière puissante de mettre en lumière la fragilité des femmes face aux maladies cardiovasculaires, souvent qualifiées « tueur silencieux ». Avec ce fake out of home, la marque a voulu susciter une interpellation rapide et un appel à l’action, donnant une première impulsion à un mouvement de sensibilisation qui perdurera avec la campagne #SantéÉgalitéPriorité.

 

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En observant de près toutes ces campagnes, il est possible de déceler de petites imperfections. Des détails qui n’ont cependant pas terni le résultat : chacune des vidéos a généré un grand nombre de vues et un engagement fort… Au point de susciter le doute chez les audiences !

 

Face aux risques et critiques du FOOH, la prudence est de mise

Face à toute nouveauté, des inquiétudes et de nouveaux défis émergent. Le FOOH ne fait pas exception. Typiquement, certains soulèvent des questions éthiques, notamment autour du dilemme suivant : l’ambiguïté entre la réalité et la fiction. En effet, les consommateurs peuvent être induits en erreur par ces publicités virtuelles de par leur capacité à tromper l’œil, ou à brouiller la perception. Qu’en est-il alors de la transparence et de l’intégrité ? L’industrie de la publicité semble être aux prises avec la « moralité du faire semblant ». Le risque est d’autant plus grand dans un contexte où les fake news et la désinformation sont devenues monnaie courante.

Alors, la marque doit-elle signaler que sa publicité est générée par IA, ordinateur ou basées sur la réalité augmentée ? Plusieurs recommandations (divergentes) sont partagées à ce sujet. Retenons celles-ci :

  • Il est essentiel que l’annonceur assume pleinement « le fake » jusqu’au bout ;
  • Le message véhiculé doit être clairement identifiable comme étant une publicité ;
  • L’annonceur doit être transparent en étiquetant son contenu du mot FOOH, en répondant aux commentaires au sujet de la « véracité » du contenu…

Le tout pour établir une relation de confiance avec le public, tout en donnant la priorité à l’authenticité dans la campagne. En parallèle, la qualité du contenu ne doit pas non plus être négligée. En effet, le succès d’une activation FOOH dépend de son exécution : mal réalisée, celle-ci peut avoir un impact négatif sur l’image de marque. Enfin, notons que – comme pour toute campagne – la réussite d’une publicité en plein air virtuelle repose sur différents facteurs. À savoir, la définition de ses objectifs en amont, la compréhension de son public cible, la créativité du contenu, le choix d’un « lieu » stratégique, la collaboration avec des partenaires qualifiés, la plateforme de diffusion, ainsi que la mesure et l’analyse de ses résultats pour ajuster son approche.

 

L’avenir du FOOH dans le marketing

Le FOOH, en dépit de son caractère innovant, n’est pas exempt d’interrogations quant à son avenir dans le marketing. Est-ce une énième mode passagère ? Ou une tendance durable et « normale » pour notre société toujours plus connectée et digitale ? Une pratique vouée à se banaliser ? Il est encore trop tôt pour le dire. Néanmoins, il est certain que cette approche offre de nombreuses possibilités créatives, permettant aux marques de proposer des expériences immersives et captivantes. S’il ne remplace pas les méthodes existantes, le Fake Out Of Home semble être un complément des plus efficaces (et non un subsitut) aux formes traditionnelles de marketing. En outre, il offre une nouvelle dimension à la publicité. Par ailleurs, il serait réducteur de dire que le FOOH est un « faux marketing ». Son but premier n’est pas de tromper les consommateurs mais bien d’enrichir leur expérience, comme le précisent plusieurs professionnels avec qui nous avons échangé.

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Comment les marques exploitent-elles – et exploiteront-elles – cette nouvelle pratique de manière éthique et responsable, tout en offrant des expériences attrayantes et engageantes ? Nous avons rencontré différentes agences pour le découvrir et mieux nous projeter.

 

Pour aller plus loin, nous en avons discuté avec des pros !

L’analyse de Sébastien Wullems, Managing Director de Busterwood

JUPDLC : Vous êtes récemment partis à la conquête de l’Arc de Triomphe avec Sony Picture France pour promouvoir le film Napoléon. Pouvez-vous nous parler de cette opération ?

Sébastien Wullems : La volonté du Distributeur Sony Pictures était de propager la campagne sur des emblèmes iconiques de la France et de Napoléon. Édifié sous l’impulsion de l’empereur et de renommée internationale, l’Arc de Triomphe s’imposait comme une évidence pour ce film.

L’opération est toujours en cours et il est trop tôt pour tirer un bilan définitif mais les premières retombées sont excellentes en tous points ! La vidéo suscite des millions de vues et des milliers de réactions positives à travers le monde.

 

JUPDLC : Qu’est-ce qui fait du FOOH une source d’inspiration notable pour les créatifs actuellement ?

Sébastien Wullems : Chez Busterwood nous préférons parler de DUC (Digital Urban Content), cela regroupe deux tendances. D’une part les FOOH, qui sont des structures digitales respectant certains codes de la vie réelle tels que les points d’ancrage des structures ou encore les lois de la physique. Et d’autre part, les CGI vidéos, des contenus digitaux surréalistes qui sont sans ambiguïté quant à leur véracité. Dans tous les cas ces contenus permettent à nos créatifs de laisser libre cours à leur imagination sans être bridés par les contraintes de budget ou de faisabilité d’exécution.

 

JUPDLC : Quels sont les principaux objectifs que les annonceurs cherchent à atteindre avec des campagnes FOOH ?

Sébastien Wullems : L’objectif premier de ces contenus est la recherche de viralité via l’engagement des viewers et les conversations qu’ils génèrent.

 

JUPDLC : En parallèle, beaucoup de spécialistes du marketing évoquent le besoin d’authenticité, de transparence et de responsabilité dans la communication. Le « fake » ne va-t-il pas à l’encontre de ces attentes ? Le FOOH ne pourrait-il pas se retourner contre les annonceurs ?

Sébastien Wullems : Les FOOH n’ont absolument pas pour vocation de désinformer ou de causer un quelconque préjudice. Leur existence réside dans la volonté de surprendre, de créer, de s’affranchir des contraintes physiques ou budgétaires. Par ailleurs, dans une sphère marketing qui cherche des solutions de communication plus responsables et pour autant toujours plus surprenantes et stimulantes, les DUC / FOOH permettent de surprendre sans surconsommer en matériel éphémère et logistique. Ceci étant dit, nous rejoignons le besoin de transparence et recommandons à nos clients d’être honnêtes à l’image des contenus créés sous IA notamment.

 

JUPDLC : Existe-t-il une « bonne utilisation » du FOOH ? Quel conseil donnez-vous à vos clients à ce sujet ?

Sébastien Wullems : Les FOOH perdent de leur intérêt lorsqu’ils se substituent simplement à la réalité, au-delà de la nécessité de transparence évoquée précédemment. Leur bonne utilisation réside dans la capacité à dépasser les limites du réel sans oublier évidemment de porter une attention particulière à la créativité et au storytelling. C’est sur ce dernier point que nous conseillons nos clients.

La simple exposition de bâches ou d’objets géants ne suffira bientôt plus à susciter la surprise. Il est donc essentiel de réfléchir au storytelling qui entoure ces contenus, le pourquoi du lieu choisi vis-à-vis de la marque ou du produit, ou encore l’importance des détails dans l’intégration.

Les DUC / CGI Vidéos sont des trends depuis des années sur les réseaux sociaux, ce qui est nouveau c’est l’intérêt que portent les marques pour ces contenus. À l’instar de toutes autres solutions de communication, la pérennité pour les marques et l’intérêt pour le public résident dans la capacité à continuer de surprendre via la créativité.

Dans la mesure du possible et en qualité de producteur de contenus en réalité augmentée, nous recommandons également aux marques d’ajouter cette dimension technologique afin de passer du contemplatif à l’expérientiel.

 

L’avis de Valentin Fertillet, Cofondateur et CEO de Socialclub

JUPDLC : Vous avez récemment réalisé une campagne FOOH pour Xiaomi France. Pourquoi ? Quelles ont été les réactions ?

Valentin Fertillet : Cette activation s’inscrit dans une campagne globale comprenant des films, des prints, un event et de l’influence. Le but était de mettre en avant le stockage inédit et la qualité photo exceptionnelle du nouveau Xiaomi 13T, co-conçu avec Leica. Le message que nous voulions faire passer était double : grâce à l’optique Leica, capturez de superbes clichés, et grâce à son téraoctet de stockage, ne laissez pas le manque de mémoire brider votre créativité !

Pour illustrer ces bénéfices, nous avons choisi un concept de billboard peu ordinaire, le FOOH (pour Fake Out Of Home), créé avec l’accord de JCDecaux. Les réactions ont été celles que nous attendions, entre surprise et interrogation. « Comment c’est possible ? », « Est-ce que c’est vrai ? »… La réalité (ou non) de l’activation et les coulisses de sa création ont été de précieux leviers de conversation. Pour les curieux, le « behind the scenes » est d’ailleurs disponible.

 

JUPDLC : Pourquoi un tel engouement et engagement autour de ce nouveau format ?

Valentin Fertillet : L’engagement des consommateurs réside dans le doute qui s’installe après le visionnage d’un FOOH, tant la frontière entre réalité et 3D est ambiguë. Jacquemus et ses sacs à Opéra avaient fait couler beaucoup d’encre, car cette chorégraphie de sacs géants en 3D aurait pu être complètement réelle.

Pour les annonceurs, l’engouement est motivé par l’innovation, mais aussi par des raisons budgétaires. Le fait de ne plus avoir à tout tourner « pour de vrai » permet de générer des conversations de manière beaucoup moins coûteuse. Les avancées techniques de la 3D permettent de créer des contenus bluffants de réalisme, et elles sont aujourd’hui accessibles à bon nombre de 3D artistes !

 

JUPDLC : D’ailleurs, comment mesurez-vous l’efficacité d’une campagne FOOH ?

Valentin Fertillet : D’un point de vue quantitatif, on regarde surtout le nombre de vues totalisées auprès des différents comptes et médias qui partagent l’asset. Ce type de contenu est repris facilement et de manière assez naturelle. Par exemple, notre FOOH pour Xiaomi a été partagé de manière organique par des comptes avec plusieurs millions de followers.

D’un point de vue qualitatif, nous nous attardons surtout sur les commentaires des consommateurs. Ce qu’on cherche à comprendre, c’est si le FOOH a eu l’effet escompté (générer de l’interrogation) et s’il est considéré comme original ou bien exécuté. Surtout dans un contexte où l’on voit de plus en plus ce format !

Dans tous les cas, avec ce type d’asset, nous visons en priorité la notoriété, l’image et l’engagement.

 

JUPDLC : Ces fausses publicités détonnent et stimulent notre imagination, mais il faut procéder avec prudence. Il y a notamment un aspect moral et éthique à considérer. Quels conseils donnez-vous à vos clients quant à leur utilisation ? Faut-il mentionner dès le départ que « c’est faux » ?

Valentin Fertillet : Tout d’abord, d’un point de vue créatif, il ne faut pas confondre intelligence artificielle et FOOH. Le FOOH ne fait appel à aucune propriété intellectuelle existante, contrairement à l’IA. Dans le cadre du FOOH, il s’agit d’incruster un objet 3D animé et photoréaliste dans le monde réel et qui va interagir avec ce monde. C’est un processus finalement très artisanal, manuel et chronophage. La seule contrainte légale peut être la négociation de certains droits. Pour montrer des monuments, certaines rues, ou encore des passants, par exemple.

Si le FOOH joue entre le réel et l’imaginaire, il reste essentiel de s’imposer les mêmes valeurs et limites éthiques que dans le monde réel. Par exemple, The North Face avait habillé le Big Ben d’une doudoune en FOOH, et avait été critiqué sur l’utilisation d’une aussi grande quantité de plastique dans le cadre d’une activation publicitaire. Alors même qu’elle n’a jamais eu lieu en réalité !

Se pose ensuite la question d’induire en erreur le consommateur. L’intérêt est de jouer sur le doute. On risque alors de le perdre en « disclaimant » qu’il s’agit d’un FOOH d’entrée de jeu. En revanche, cela n’empêche pas de poser certaines limites, et de se demander : si c’était réel, quelles en seraient les conséquences ? Cette question permet de limiter les faux pas, et de ne pas envisager les FOOH comme un monde sans lois.

 

JUPDLC : En parlant de lois, cette pratique est-elle suffisamment encadrée selon vous ?

Valentin Fertillet : Pas assez, comme c’est souvent le cas pour les nouvelles typologies d’activations. Surtout celles qui se basent sur une technologie. C’est le rôle des agences d’être proactives dans la construction de ce cadre. Par exemple, en ne lésinant pas sur la question des droits d’exploitation ou à l’image. C’est d’ailleurs dans cette démarche que nous avons contacté JCDecaux, puisque leur mobilier apparaît dans le FOOH créé pour Xiaomi.

 

Le point de vue de Marcus Benisty, Cofondateur de The Sun Project

JUPDLC : Quel est l’impact du FOOH sur l’industrie de la publicité ? En quoi redéfinit-il les règles du jeu ?

Marcus Benisty : Les FOOH repensent intégralement la manière dont les marques communiquent car cela oblige à penser avec un storytelling omniprésent et non un focus produit. Son impact est conséquent car – comme dans tous les nouveaux formats – les performances organiques sont très fortes (en général 1 Million de vues minimums pour les marques ou les créateurs).

Cela oblige à repenser tous les scopes des campagnes de A à Z. Une campagne qui se pensait à l’époque avec une activation digitale et un push media, se réfléchit aujourd’hui avec un teasing FOOH, un push créateurs et un tout petit peu de médias, voire pas du tout. La ventilation des budgets d’activations ou Kick-off Produits se répartissent donc avec plus d’ambition sur la production et l’influence plutôt que sur le média, peu importe le pays.

 

JUPDLC : Comment fonctionne cette opération virtuelle en plein air ? Quels sont les outils utilisés pour créer des campagnes publicitaires qui défient la réalité ?

Marcus Benisty : Pour réaliser ce genre de vidéos, il faut tout d’abord une idée. C’est une histoire que l’on va raconter dans un format court et impactant à destination des réseaux sociaux. Elle ne vise pas la vente mais la narration autour du sujet, qui par la suite déclenchera le partage. C’est ça qui fait toute la différence !
Techniquement, il est nécessaire de faire une prise de vue réelle dans la rue, ou l’endroit sélectionné, en s’assurant que les éléments soient bien sujets à une méthode de tracking qui opérera directement dans un logiciel 3D en postproduction. Puis, nous avons l’intégration des objets 3D dans ce décor réel, l’ajustement des lumières et la méthode de rendu… C’est tout cela qui fait la qualité finale des vidéos.

 

JUPDLC : Est-ce un avant-goût du Web3/du metaverse selon vous ?

Marcus Benisty : Oui et non. Pour être transparent, cela s’assimile plus au fantasme du metaverse qu’à une projection directe. Ce n’est d’ailleurs pas pour rien que cette tendance arrive après la phase d’éducation sur la réalité augmentée et la réalité mixte, ou après celle du Web3. Pour expliquer un nouveau sujet à une audience visée, il est capital de passer par des étapes de compréhension. Qu’est-ce que c’est ? Comment ça fonctionne ? À quoi cela va-t-il ressembler ?

À titre personnel je vois ces contenus comme une transition éducative sur les nouveaux formats qui vont s’implanter dans le quotidien des consommateurs.

 

JUPDLC : En quoi le FOOH permet-il une plus grande créativité par rapport à d’autres formes de publicité extérieure ?

Marcus Benisty : Le FOOH c’est la liberté créative par excellence. Cela permet de repousser les limites de ce que l’on pense et imagine, en le mettant en application de façon immédiate dans le feed des utilisateurs. Les logiciels 3D et les performances des nouveaux devices permettent de faire quasiment tout ce que l’on veut ! Du moodboard en IA à la postproduction 3D, en passant par la motion capture… Tous les outils sont bons pour réaliser les plus belles vidéos. À cela on ajoute un concept fort et pourvu de sens, puis on obtient ce genre de vidéos qui apportent un coup de magie dans la timeline des utilisateurs.

 

JUPDLC : À l’heure où toutes nos expériences sont relayées sur les réseaux sociaux, certains associent le FOOH à la plus « grosse future tendance publicitaire ». Quel est votre avis ?

Marcus Benisty : Je pense que c’est déjà LA grosse tendance publicitaire sur les réseaux. Comme la plupart des early stages de chacune des innovations contenus, on est actuellement dans la phase 1 : celle qui reprend principalement des idées divertissantes. Elle débouchera sur la phase 2 : celle de la prise de conscience et d’éducation, comme nous avons eu avec la réalité augmentée ces dernières années.

 

Alors, convaincu ?

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Crédits photos : Instagram & TikTok / @eyestudioae, @philharmonie_lux, @jdofficial
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