Dans l’ombre du succès du Comte de Monte-Cristo et de Vice Versa 2, To the Moon est presque passé sous les radars. Selon Boxoffice Pro, le film « vise la Lune, mais peine à dépasser l’atmosphère avec ses 60 000 entrées. » Pourtant, le pitch a de quoi nous mettre l’eau à la bouche : la mission Apollo 11, avec un casting 5 étoiles (Scarlett Johansson, Channing Tatum), un gros budget… Et, qui plus est, sous l’angle de la communication ! On pouvait difficilement passer à côté. Nous nous sommes donc rendus dans les salles obscures pour nous en faire une idée.
Nous étions presque étonnés de voir une salle pleine à craquer. Presque, oui, car même si le box-office laisse à désirer, To The Moon a de quoi éveiller les curiosités. L’espace a toujours fait rêver. Interstellar, Gravity, Star Wars, First Man… On ne compte plus le nombre de films qui sont devenus cultes. Outre l’intrigue romantique (un peu gluante, mais divertissante), le film nous invite à nous interroger sur la réelle histoire derrière le tout premier voyage sur la Lune. Et, surtout, sur la manière dont la NASA a communiqué à son sujet.
Mais alors, qu’est-ce qui est vrai dans To the Moon ? Qu’est-ce qui relève de la pure fiction ? Et quelles leçons de marketing et communication peut-on en tirer ? Venez avec nous, une fois n’est pas coutume, on vous emmène sur la Lune !
To the Moon : un film qui mêle fiction et réalité
Réalisé par Greg Berlanti, To The Moon nous plonge dans les années 60, au cœur de la guerre des étoiles et de la course à l’espace. En 1969, alors que la mission Apollo 11 se prépare à envoyer le premier homme sur la Lune avant l’URSS, la NASA sollicite Kelly Jones (interprétée par Scarlett Johansson), une experte en marketing. Sa mission principale ? Convaincre le grand public et les sénateurs d’adhérer au projet, et attirer des marques pour renflouer les caisses. Sa side quest ? Préparer un film de secours en studio, au cas où l’alunissage ne se passerait pas comme prévu. Le tout s’articule sur une intrigue type de romcom à l’américaine, où la fine ligne entre amour et haine est explorée dans une relation tumultueuse entre Kelly et Cole Davis (Channing Tatum), le directeur de la mission.
Pour tout dire, le film ne fait pas honneur au monde de la publicité. To The Moon ne manque pas de se moquer ouvertement du secteur, souvent assimilé à de l’escroquerie et des mensonges répétés. Mais prenons les choses avec nuance, nous n’en attendions pas moins d’une comédie satirique. Cette approche soulève toutefois d’autres problématiques. Comme Le Monde en atteste : « Bien qu’amusé, le spectateur ne sait plus très bien ce qu’il est venu regarder. To the Moon n’étant jamais assez clair sur ce qui relève du fait réel ou de la pure fantaisie. » Se jouant des théories du complot autour de l’événement, le film réinvente les coulisses d’Apollo. Au point où nous nous demandons : comment démêler le vrai du faux ? Et qu’est-ce que cela nous raconte du marketing autour de l’espace ? Débunkage !
Vrai ou faux ? Débunkage de To the Moon
1. Le projet Apollo ne faisait rêver personne
VRAI. Tout le monde rêve d’aller sur la Lune. Mais faut-il encore choisir le bon moment. Et en 1969, la tête des Américains est bien ailleurs que dans les nuages. À cette époque, les États-Unis sont embourbés depuis près de 15 ans dans une guerre au Vietnam. Face à ce conflit, coûteux en hommes et en moyens, la conquête spatiale paraît un sujet futile. Pour couronner le tout, à l’intérieur des frontières, le Civil Rights Movement fait rage.
Les Américains estiment que les sommes astronomiques allouées par le gouvernement aux missions vers la Lune pourraient être mieux employées ailleurs. En effet, le programme Apollo a coûté 150 milliards de dollars aux contribuables américains. Mais dans le contexte de Guerre Froide, les Etats-Unis ne peuvent pas perdre la course à l’espace. Et son grand rival a déjà bien de l’avance. En 1961, le Soviétique Youri Gagarine fût le premier cosmonaute à quitter l’atmosphère. Comment faire mieux ? Envoyer un homme sur la Lune. Et ce, avant les Russes.
Comment faire accepter la quête des étoiles alors que les problèmes s’accumulent sur Terre ? Comme le dit si bien Kelly Jones après avoir vu les horreurs du Vietnam au journal télévisé : « On ne passera jamais avant ça ». C’est ici qu’intervient la communication, et qu’on comprend l’importance de son rôle à jouer.
Finalement, la mission Apollo 11 a été un véritable succès. 650 millions de personnes, soit 1/5e de la population mondiale, ont regardé Neil Armstrong devenir le premier homme à marcher sur la Lune.
2. La NASA s’est appuyée sur des consultants marketing
FAUX. Dans To The Moon, Kelly Jones est présentée comme l’une, si ce n’est LA plus grande experte en marketing de son temps. Dès les premières minutes, le film la présente dans son élément. Dans le tumulte d’un bureau perché au énième étage d’un immeuble de la Madison Avenue, la publicitaire hors pair déboule avec ses arguments (pas forcément honnêtes) et ses atouts (pas forcément commerciaux) pour convaincre ses clients. La scène se fonderait aisément dans le décor d’un épisode de Mad Men. Les aficionados (comme nous) ont pu se délecter d’une once de nostalgie. Et ce n’est pas du hasard. La scénariste du film, Rose Gilroy, a déclaré qu’elle s’était inspirée de Don Draper pour imaginer le personnage de Kelly. Une belle immersion dans l’âge d’or de la pub donc, mais qui n’a rien à faire dans un film sur le projet Apollo 11.
D’anciens journalistes devenus pros des RP
Cliché, romancé, le personnage de Kelly Jones n’a jamais existé. Son histoire, en revanche, est inspirée de personnes bien réelles. Si, dans sa quête d’approbation du public américain, la NASA n’a pas travaillé avec une agence de pub, elle a bien fait appel à des experts pour qu’ils s’attellent à la tâche. Et pour ce faire, elle s’est appuyée sur son bureau des affaires publiques. Ce ne sont pas des pubards, non, mais d’anciens journalistes reconvertis en pros des RP qui ont été engagés pour travailler comme reporters au sein de l’agence fédérale. Leur mission ? Investiguer et déterminer les sujets que le public devait connaître sur le programme et les diffuser dans un langage accessible. Grâce à leur expérience des médias, ils avaient l’avantage de connaître en profondeur leur fonctionnement et leurs besoins. Bien pratique pour assurer une couverture médiatique d’ampleur !
Cette démarche, que l’on pourrait qualifier aujourd’hui de « journalisme de marque », ou « brand journalism » constituait alors une étape inédite et révolutionnaire pour une agence gouvernementale. Plus encore, pour David Meerman Scott, co-auteur de l’ouvrage Marketing The Moon : « L‘une des choses que la NASA a réalisées, c’est qu’elle a été, à bien des égards, la pionnière du concept de « content marketing », c’est-à-dire de la création d’un contenu susceptible d’intéresser à la fois les journalistes et le grand public. »
Parmi les journalistes engagés, Julian Scheer pourrait être désigné comme la personne la plus proche du personnage interprété par Scarlett. C’est lui, d’ailleurs, qui a eu l’idée d’embarquer des caméras dans l’espace, malgré les réticences des ingénieurs. Pour cela, nous pouvons accorder au film une part de fidélité à l’Histoire. L’inimitié à l’écran entre Kate et Cole à ce propos retranscrit bien celle qui s’est tissée Julian et Deke Slayton, responsable de la sélection et de l’entraînement des astronautes. Notons, en l’occurrence, que l’histoire et la carrière de ce dernier ont largement inspiré celles du personnage de Channing Tatum.
Comment la Nasa a (vraiment) vendu la Lune
Pour mener à bien cette campagne d’acceptabilité, le bureau des affaires publiques et son équipe d’ex-journalistes se sont appuyés sur des principes qui ne datent pas d’hier. Tout bien analysé, leur stratégie a reposé sur un concept éprouvé, faisant appel aux trois fondamentaux de la rhétorique. La campagne s’est ainsi construite sur une triade entre le logos (le discours et sa démonstration) pour éduquer la population, le pathos (les passions et les émotions) en exploitant, entre autres, le sentiment de fierté nationale. Et l’ethos (la personnalité et la réputation de l’orateur), en faisant des astronautes et scientifiques les ambassadeurs stars du programme.
Éduquer le public et les médias
Pour éduquer le public et modifier sa perception sur le projet Apollo, le bureau des affaires publiques de la NASA a joué la carte de la transparence. Dans un objectif de partage clair de l’information, ce dernier a préparé des classeurs remplis de faits et données à l’intention des journalistes. On y trouvait des diagrammes et graphiques expliquant toutes les technologies impliquées dans les lancements et leur fonctionnement. Les documents présentaient également les menus des astronautes, leurs tenues, etc. De quoi brosser le sujet en long, en large et en travers. Selon David Meerman Scott : « Il y avait un dossier de presse de près de 300 pages pour Apollo 11. Ce document massif permettait aux différents types de médias de trouver l’angle dont ils voulaient parler. »
En outre, le bureau a offert aux programmes d’informations télévisées de nombreuses occasions d’interviewer les scientifiques impliqués dans la mission. Contrairement aux Soviétiques, la NASA permettait à son personnel et à ses astronautes de s’exprimer librement.
Cette approche a fait ses preuves, et continue d’être appliquée. Sur une page dédiée à la carrière de Scheer sur le site de la NASA, l’agence affirme que les politiques que lui et ses équipes ont mis en place persistent encore aujourd’hui. 55 ans plus tard, les agences spatiales font toujours preuve de pédagogie auprès du grand public. En France, le CNES par exemple, s’adapte à son temps. L’agence est présente sur les réseaux sociaux et y partage du contenu éducatif et ses actualités. Sur TikTok, l’agence a d’ailleurs fait appel à @space_thomalice, vulgarisatrice scientifique, pour diffuser une série de vidéos explicatives. Plus récemment, c’est le créateur de contenu Michou qui a pu commenter le lancement d’Ariane 6 en live, avec l’ingénieur spatial Allan Petre.
@cnes_fr Pourquoi lancer des fusées depuis la Guyane française ? @space_thomalice vous explique depuis la plage de Kourou 🚀 Prêts pour le lancement d’Ariane 6 ? #spacetok #apprendresurtiktok #guyane #ariane6 ♬ son original – CNES
Le recours à l’imaginaire et aux émotions
Dans les années 1950, les voyages spatiaux avaient déjà trouvé terrain fertile dans l’imaginaire collectif. Le thème de l’espace se développait dans la littérature, les films, ou encore les magazines. Walt Disney, notamment, passionné par la course aux étoiles, s’était associé avec le scientifique Wernher von Braun pour créer des programmes TV tel que Man in Space. Dans cette émission à succès, il présentait l’espace comme une nouvelle frontière à explorer. À la fois divertissants et éducatifs, Disney désignera ces formats novateurs comme de « l’edutainment ».
Au-delà de l’imaginaire sci-fi, le programme Apollo prône le dépassement de soi et fait appel à la fierté nationale dans un contexte de guerre des étoiles. Il est inconcevable, pour les États-Unis, de se faire devancer par l’URSS.
Des astronautes ambassadeurs
Les astronautes américains ont été mis sous le feu de la rampe. Armstrong, Aldrin et Collins ont signé des accords exclusifs avec Life magazine, devenant les visages héroïques du programme Apollo. Propulsés sur le devant de la scène, ils incarnaient l’American Dream et l’appétit de remporter la course contre les Soviétiques. Selon le Washington Post, Julian Scheel, a su faire « sortir les astronautes de leurs combinaisons de vol et les faire entrer dans la conscience du public en tant qu’avatars de l’esprit d’initiative américain ».
Les astronautes, oui, mais pas que ! Le bureau s’est également appuyé sur la notoriété de Walter Cronkite. Le journaliste charismatique était, selon le NYT « couramment décrit à l’époque comme l’homme le plus digne de confiance d’Amérique. » C’est lui, aux côtés de l’ancienne astronaute Wally Schirra, qui animera l’émission sur CBS en ce fameux jour de juillet 1969. Près de la moitié des 57 millions de téléviseurs du pays sont branchés sur sa chaîne quand il déclare : « La date est désormais indélébile. On s’en souviendra aussi longtemps que l’homme survivra. »
Aujourd’hui, certaines choses demeurent. En témoigne la popularité de Thomas Pesquet, notre star nationale, qui enchaîne les émissions TV et cumule aujourd’hui plus de 2,5 millions d’abonnés sur Instagram. Et pour l’anecdote, sachez qu’Aldrin n’en a pas fini de danser avec les stars. S’il l’a littéralement fait en 69, l’ancien astronaute a également participé à l’émission phare éponyme en 2021. Décidément, Buzz porte bien son nom.
3. Des marques ont sponsorisé le projet
PAS VRAIMENT. Dans le film, Kelly Jones a trouvé LA solution pour faire connaître le programme Apollo tout en renflouant les caisses. Utiliser les marques pour faire de la publicité. Toujours à la manière d’un Don Draper ou d’une Peggy Olson, elle dévoile ainsi à Cole Davis, le directeur de la mission, différentes affiches de publicité sur des chevalets. La réalité est un peu différente…
Le site web de la NASA stipule qu’« en tant qu’agence gouvernementale, la NASA n’encouragera ni ne soutiendra, ni ne semblera encourager ou soutenir un produit, un service ou une activité commerciale ». Les parrainages ne faisaient donc pas partie de la campagne de relations publiques d’Apollo 11, n’en déplaise à Kelly Jones. Les produits utilisés par la Nasa étaient choisis avec soin par les experts de l’agence pour leur qualité et leur fonctionnalité avant tout. La notoriété qui suivait ce choix était un bonus pour la marque. Cette dernière se faisait effectivement une joie de surfer sur l’espace pour vendre son produit.
La montre Omega
Régulièrement, Kelly Jones interrompt les entraînements des astronautes pour leur demander de se joindre à un shooting photo pour afficher ostentatoirement leurs montres. En réalité, il n’y a pas eu de publicité en amont de la mission. Les astronautes ont choisi eux-mêmes leur montre pour leur résistance d’abord, leur esthétisme ensuite. Une montre performante était cruciale pour chronométrer scrupuleusement toutes les phases des missions. La Omega fut la seule à réussir l’ensemble des tests organisés par les experts.
La Speedmaster Omega devient ainsi la montre officielle de la Nasa en obtenant le prestigieux titre de « Qualified NASA Flight Equipment » en 1965. Les dirigeants de la marque n’en avaient pas eu vent, jusqu’à ce qu’ils voient les photos des astronautes, tel qu’Ed White, avec la montre au poignet. Et pour ce qui est d’Aldrin et Armstrong, ils ont découvert en même temps que le reste du monde, devant leur poste de télé, que la montre qu’ils avaient fabriquée était allée sur la Lune. La marque profite de cet exploit pour lancer une grande campagne de publicité pour la Moonwatch.
La boisson Tang
Tang est régulièrement citée dans le film. Et pour cause : en 1965, la Nasa utilise la boisson dans le programme de ses vols spatiaux habités. Quoi de mieux qu’une boisson en poudre pour aller dans l’espace ? Elle servait en effet à aromatiser l’eau de récupération du système de vie de la capsule Gemini qui était destinée à être consommée par les astronautes. Suite à cette utilisation, la marque fit de nombreuses publicités sur le thème de l’espace. Tang était d’ailleurs surnommée « la boisson des astronautes ».
Hasselblad
Tout comme la montre Omega, l’appareil photo Hasselblad a été choisi pour sa résistance aux conditions extrêmes : températures intenses, vibrations et diminution de la gravité dans l’espace. L’appareil photo a pu documenter ce moment historique. La marque célèbre encore aujourd’hui le fait d’avoir été choisie par la Nasa.
Et aujourd’hui ?
Ainsi, ces marques ont profité du coup de projecteur offert par la NASA sur leur produit. La conquête spatiale continue de faire rêver aujourd’hui et de nombreuses collaborations voient régulièrement le jour. La dernière en date ? LEGO s’est associé à l’Agence spatiale européenne (ESA) pour créer des briques en poussière de météorite, produites par impression 3D. Les scientifiques ont recréé cette poussière à partir de roche spatiale vieille de 4,5 milliards d’années. Ce projet permet d’avoir un aperçu de la manière dont nous pourrions bâtir des structures sur la Lune.
Pour ce qui est des vêtements, vous avez sûrement déjà vu un tee-shirt avec le logo de la NASA. L’agence spatiale a effectivement donné son accord pour utiliser le logotype, et ce, après avoir respecté un protocole précis. Mais elle ne retire aucun profit sur ces produits.
Néanmoins, l’agence spatiale gouvernementale a commencé à être mise à l’écart par des start-up créées par des initiatives privées (Elon Musk et Jeffrey P. Bezos), qui cherchent à exploiter le potentiel commercial du cosmos. Ne voulant peut-être pas être totalement éclipsée par les entreprises commerciales, la NASA a annoncé qu’elle autoriserait les citoyens privés à visiter la Station spatiale internationale – moyennant un prix élevé, bien sûr.
4. L’alunissage a été filmé en studio
FAUX. Le programme Apollo a fait parler de lui. Il a mobilisé des centaines de milliers de personnes, rassemblé des centaines de millions de téléspectateurs et se trouve aujourd’hui dans les livres d’Histoire. Mais s’il a su rassembler, il a aussi su diviser. Après le retour sur Terre des trois astronautes, des rumeurs se sont mises à courir. Ces théories du complot, nous en avons tous eu vent. Un petit pas pour l’homme, un grand pas pour l’humanité, c’est du chiqué ?
C’est du moins ce que croit encore aujourd’hui plus d’un Américain sur dix. Pour certains, l’Homme ne serait jamais allé sur la Lune. Pour d’autres, Buzz et Neil y ont bien foulé le pas, mais la vidéo retranscrite sur les postes de télévision aurait été filmée en studio. Soit parce que les technologies de l’époque, trop peu avancées, auraient rendu la tâche difficile, soit parce que les USA ne pouvaient pas prendre ce risque si les choses tournaient mal.
Un film dans le film
C’est de cette deuxième hypothèse, nommée projet Artemis (nom tiré de la déesse grecque, jumelle d’Apollon) que le film se joue. Dans To the Moon, alors que l’échéance du décollage se rapproche, Moe Berkus, émissaire du gouvernement, s’en vient quérir Kelly pour cette mission classée secret-défense. Ses arguments : que se passerait-il si le sujet capote ? Que penserait le monde (et pire, les soviets) d’une telle défaite ? Trop risqué : les Américains, déjà meurtris de la catastrophe d’Apollo 1, en prendraient un sacré coup au moral.
Ni une, ni deux, Kelly mobilise son meilleur réalisateur. Dans certaines théories, c’est le grand Stanley Kubrick, rompu à l’exercice avec 2001, l’Odyssée de l’espace, sorti un an plus tôt, que l’on accuse d’être dans le coup. Berlanti s’en joue d’ailleurs, avec un clin d’oeil au réalisateur dans une réplique de Kelly. Sans trop spoiler, nous dirons que cette dernière aura mis en place un décor plus vrai que nature et aura tout préparé, au millimètre près, pour le grand jour.
Le vrai du faux
Remettons les choses à leur place. Ce faux alunissage est bien l’une des plus grandes libertés créatives que prend le film. Une liberté potentiellement dangereuse, pour certains critiques, car elle accrédite l’idée que le gouvernement américain a truqué l’alunissage. Mais il n’existe aucune preuve suggérant que la NASA a filmé une fausse vidéo à quelque moment que ce soit.
Cette idée étant une véritable théorie du complot, cet aspect de To the Moon n’est donc pas basé sur des faits réels. La scénariste Rose Gilroy a précisé que l’idée venait de Scarlett Johansson et de sa société. Interviewée par The Wrap, elle précise qu’il n’y a jamais eu d’hésitation ou de nervosité à l’explorer, même à une époque où ces théories se répandent comme une traînée de poudre sur Internet.
La scénariste a indiqué éprouver une grande admiration pour les réalisations de la NASA et n’avait pas l’intention de diminuer leur exploit. Les éléments de complot dans le film sont là pour divertir, tout en soulignant l’importance de la vérité. Le réalisateur Berlanti voit dans l’approche audacieuse du film une marque de courage. Selon lui, il est pertinent, surtout aujourd’hui, de confronter ces théories du complot. Il affirme que même la NASA a trouvé cette approche acceptable.
Le Projet Artemis
Alors oui, Artemis est bien réel. Mais il n’a rien à voir avec les théories complotistes. Il s’agit d’un autre projet mis en place par la NASA. L’agence en a fait l’annonce pour la première fois en 2017. Le but : faire alunir la première femme, la première personne de couleur et le premier partenaire international sur la Lune d’ici la fin des années 2020. Les objectifs du projet Artemis incluent l’étude de l’eau et d’autres échantillons lunaires, ainsi que l’établissement de la première station spatiale sur place. À terme, la NASA vise à disposer des ressources nécessaires pour envoyer des humains sur Mars. Artemis 1 a effectué son premier vol d’essai le 16 novembre 2022.
Une technologie de pointe…
Dans le film, l’idée point quelques mois à peine avant le départ. Dans la réalité, la NASA avait déjà commencé à utiliser des photos et vidéos lors du projet Apollo 7. L’agence partageait notamment des images d’entrainement des astronautes dans un studio plus vrai que nature. Ce qui n’a pas manqué d’alimenter certaines théories, quelques années plus tard.
Pour filmer depuis la Lune, la NASA et Westinghouse ont conçu une caméra en noir et blanc, compacte et robuste, capable de supporter des températures extrêmes pour filmer depuis la Lune. L’objectif était alors de créer une caméra aussi puissante qu’un studio TV pour l’accrocher au module lunaire. Pour diffuser les images mondialement, la NASA a utilisé trois stations de réception (aux États-Unis et en Australie) qui ont converti le signal lent de la caméra en un format adapté aux télévisions.
… au service du grand public
Aujourd’hui, à l’instar de l’ESA, sur son compte Instagram, son site et ses autres réseaux, la NASA continue de partager au monde entier ses découvertes spatiales. Thomas Pesquet aussi, d’ailleurs, et il rencontre les mêmes difficultés que l’agence américaine. L’astronaute a confié recevoir de nombreux messages l’accusant de mentir et de tout inventer.
Voir cette publication sur Instagram
Les agences spatiales privées quant à elles (SpaceX et Blue Origin), communiquent aussi auprès du grand public. Mais elles sont moins dans la pédagogie que dans le partage de leurs exploits (lancement de fusées, missions accomplies, etc.).
Même si tout n’est pas parfait, To the Moon explore un sujet méconnu : le rôle de la communication et du marketing dans la conquête spatiale. Nous, on s’est délectés d’une séance ciné et de recherches instructives. Il y avait tellement de choses à raconter qu’ on a eu du mal à s’arrêter. Et vous, on espère que vous avez appris des choses lors de ce voyage.