Comment le marketing d’influence s’est-il immiscé dans le milieu du vin ?

En collaboration avec Toutlevin
strategie-influence-vin-interview-toutlevin

À la fois emblème national et un des alcools préférés des Français, le vin est plus qu’une simple boisson. C’est un univers culturel, un patrimoine et un art de vivre. D’ailleurs de plus en plus de consommateurs manifestent leurs envies de parfaire leurs connaissances viticoles. Mieux connaître les cépages, savoir accorder un vin à un plat, découvrir des goûts différents… Pour y parvenir, le besoin d’information est essentiel avant de passer à l’achat. Bouche-à-oreille, cavistes indépendants, sites web spécialisés… Déjà bien installés, ces moyens de communication sont multiples, mais semblent ne plus suffire face à un intérêt et un besoin de pédagogie grandissant.

Devant cette demande croissante, le secteur a su depuis quelques années se digitaliser et investir habilement les réseaux sociaux. Pour mieux comprendre les nouvelles opportunités qui s’offrent à ce secteur, nous avons interrogé Charlotte Dominique, Rédactrice en chef du média Toutlevin et Responsable du développement commercial de l’agence du même nom.

 

Entrevue avec Charlotte Dominique, Rédactrice en chef et Responsable du développement commercial de l’agence Toutlevin

interview-agence-toutlevin
Crédit photo : Toutlevin

 

JUPDLC : Il y a encore quelques années, le monde viticole était plutôt hermétique aux réseaux sociaux, et encore plus aux influenceurs. Aujourd’hui, les grands vignobles n’hésitent pas à faire appel à des prescripteurs digitaux. Qu’est-ce qui a changé entre-temps selon vous ?

Charlotte Dominique : Effectivement, le monde du vin peut être considéré comme un secteur assez « traditionnel ». Cependant, on voit de plus en plus de vignobles travailler leur présence digitale, un peu après les autres secteurs certes, mais mieux vaut tard que jamais. À mon avis, la raison principale de cette nouvelle présence digitale est l’ambition de toucher une clientèle plus jeune. Les réseaux sociaux semblent être le vecteur le plus tangible pour cette cible. Et puis, au-delà d’un simple site internet, les réseaux sociaux servent à diffuser des messages ciblés et donc cela aide à avoir une réflexion plus approfondie sur son e-réputation. C’est un bon moyen de se démarquer dans un secteur concurrentiel, le monde du vin en a de plus en plus conscience. Pour autant, tous les acteurs du secteur ne maîtrisent pas encore les codes, il y a encore un vrai travail pédagogique à faire mais l’envie et l’enthousiasme sont là, c’est indéniable.

 

JUPDLC : Que l’on soit curieux, amateur ou simple connaisseur, le vin est un univers vaste et multiple. Le marketing d’influence est-il selon vous le meilleur moyen de le rendre accessible en le décomplexifiant ? Pourquoi ?

Charlotte Dominique : Il n’est pas le seul moyen mais il reste un outil marketing très intéressant. En effet, travailler le marketing d’influence, c’est ouvrir le monde du vin à des communautés un peu plus jeunes et surtout à une population, logiquement, moins initiée. L’approche plus décomplexée des influenceurs aiguise parfaitement la curiosité de cette jeune communauté à propos du vin. Il y a encore un travail conséquent à faire pour contrer l’image trop élitiste du monde du vin. Notre volonté est de montrer que le vin est avant tout un produit de plaisir et de partage. Il n’est donc pas réservé à une petite poignée de privilégiés. Le vin est un produit que l’on peut trouver à tous les prix et ici petit prix ne veut pas dire mauvaise qualité, bien au contraire ! Les influenceurs ont un vrai rôle pédagogique à jouer ici pour diffuser ces idées.

Podcast


JUPDLC : Les communautés de chaque réseau social (Instagram, LinkedIn, Pinterest…) possèdent ses propres particularités que ce soit en termes de moyennes d’âges, de sexes, d’intérêts ou encore de pouvoir d’achat. Quels sont les réseaux que vous privilégiez le plus pour vos clients ? Pourquoi ?

Charlotte Dominique : Nous privilégions certains réseaux plutôt que d’autres en fonction des objectifs de nos clients et de leurs cibles principales. Bien sûr, Facebook et Instagram sont les deux réseaux qui sont principalement utilisés, avec également Linkedin lorsque les cibles sont BtoB. Nous ne recommandons pas TikTok pour le moment car le public y est encore trop jeune. Pour rester dans le respect de la loi Evin, il est important d’investir un réseau social lorsque plus de 80% des utilisateurs ont plus de 18 ans.

 

JUPDLC : En marketing, on dit souvent que le vin est un produit « surprise ». On peut voir un visuel, lire un descriptif… Il est difficile pour autant de se faire une idée sur une information essentielle qui pousserait véritablement à l’achat, son goût. En suivant cette logique, ne vaut-il pas mieux privilégier des opérations ciblées de micro-influence plutôt que des opérations de grande envergure ?

Charlotte Dominique : Le vin ce n’est finalement pas qu’un produit, c’est aussi une histoire, des hommes, un terroir. Je pense que les deux styles de marketing d’influence sont possibles. Bien entendu, le budget accordé à la communication en général est souvent assez limité dans le monde du vin. Hormis bien évidemment, les grandes marques et les grandes propriétés, mais elles ne représentent finalement qu’un petit pourcentage des acteurs du vin au global.

Mais c’est vrai que nous aimons privilégier la micro-influence pour plusieurs raisons. Elle est plus adaptée en termes de budget pour le monde du vin qui n’est pas totalement mature sur le sujet de la communication digitale. Elle permet un discours authentique en phase avec les histoires de nos vignerons ce qui permet de réaliser des taux d’engagement plus élevés, car les communautés sont vraiment réceptives et à l’écoute.

 

JUPDLC : Le monde viticole s’invite sur les réseaux sociaux depuis peu. Du coup, j’imagine qu’une agence doit avant tout faire preuve de pédagogie auprès de ses clients afin de les accompagner au mieux ?

Charlotte Dominique : Effectivement, c’est bien la pédagogie qui prime. Certains de nos clients nous demandent des formations sur la création d’un compte Instagram. Le plus difficile, c’est d’expliquer à nos prospects et clients qu’il est important de professionnaliser sa communication sur les réseaux sociaux et d’y consacrer du temps et du budget. Puisque « tout le monde peut le faire » et que ces réseaux sont « gratuits », ils ont du mal à dégager du budget et du temps pour cela. Notre travail consiste donc à passer du temps avec nos clients au quotidien pour leur montrer l’intérêt de leur présence social media. Nous leur parlons d’écosystème digital : être présents là où se trouvent leurs consommateurs avec des points d’impacts qualifiés et complémentaires. Pour résumer, nos trois principaux axes de pédagogie sont les suivants :

  • La création d’une ligne éditoriale pérenne, légitime et régulière, en opposition à la pratique courante des vignerons qui consiste à laisser les stagiaires successifs gérer les réseaux sociaux chacun à leur manière.
  • Ce n’est pas la taille de la communauté qui compte ! Bon, il y a encore du chemin à faire de ce côté-là mais je pense que le monde du vin n’est pas le seul concerné !
  • Avoir un budget publicitaire dédié pour toucher la bonne cible.
strategie-influence-vin-interview-toutlevin
Crédit photo : Pexels / Brian Parker

 

JUPDLC : Les notes Parker, les citations par des leaders d’opinion dans la gastronomie… Les entreprises viticoles ont longtemps été habituées à ce que des leviers traditionnels influent sur leurs ventes. Est-ce que le marketing d’influence peut remplir cet objectif ?

Charlotte Dominique : Je ne pense pas que le marketing d’influence puisse « remplacer » les pratiques traditionnelles. C’est un outil, un moyen complémentaire qui permet de toucher une cible plus large. C’est vrai que la presse spécialisée vin n’est pas la presse la plus accessible et est souvent réservée à des professionnels du monde du vin ou de grands amateurs. Travailler avec des influenceurs permet vraiment de rendre accessible un monde perçu comme très élitiste. Et c’est une complémentarité que je trouve vraiment opportune pour le monde du vin.

 

JUPDLC : Est-ce que le marketing d’influence est l’apanage seulement des grands vignobles ?

Charlotte Dominique : La réponse est non ! Le marketing d’influence est accessible à tous, tout dépend bien entendu du budget et des objectifs qu’on y met derrière. Nous privilégions vraiment le travail des micro-influenceurs. Ils peuvent devenir de vrais ambassadeurs pour des petits vignerons et leur faire vivre une expérience humaine où la passion est de mise. Une fois leurs cœurs conquis, c’est pour la vie ! Bien entendu, les campagnes d’influence ne seront pas les mêmes en fonction du type de client mais finalement, c’est la même chose lorsque l’on compare des entreprises de grandes envergures et des petites TPE.

 

JUPDLC : Quelles sont les précautions légales à prendre avant de communiquer sur les réseaux sociaux afin de respecter la loi Evin ?

Charlotte Dominique : En fait, la différence va essentiellement se trouver ici. Dans le monde du vin on ne peut pas travailler avec n’importe quel influenceur. La loi Evin donne un cadre qu’il est important de respecter. Ce cadre, c’est avant tout du bon sens. En effet, on ne va pas travailler avec un influenceur qui parle de mode au quotidien, ce n’est pas ce que sa communauté va attendre de lui et donc le message risque de ne pas être pertinent. Il faut privilégier les créateurs ayant un contenu éditorial avec une dominante vin, gastronomie, lifestyle ou voyage lorsque l’on souhaite parler d’œnotourisme.

Ensuite les règles de prise de parole sont les mêmes que la communication traditionnelle. « L’abus d’alcool est dangereux pour la santé, à consommer avec modération » reste une mention sanitaire obligatoire. De plus, les contenus ne doivent pas montrer de bouteilles ouvertes ou des consommateurs. Enfin, les posts liés à la fête, à l’enfance, à la maternité ou à la conduite d’un véhicule sont également interdits. Et la liste est encore longue, car la loi Evin encadre minutieusement cette pratique, ce qui est tout à fait normal.

 

JUPDLC : Comment transformer ces « contraintes » légales en opportunités créatives pour vos clients ?

Charlotte Dominique : Notre travail consiste à accompagner nos clients en direct ou bien avec les influenceurs dans le cadre du marketing d’influence et à travailler une ligne éditoriale Loi Evin friendly en valorisant le produit, son terroir, son histoire, ses pratiques environnementales, son offre œnotouristique… Bref tout ce qui fait que le monde du vin à des choses à dire ! Et il y en a !

 

JUPDLC : La mixologie fait partie des nouveaux usages de consommation d’alcool. Au premier abord, le vin ne s’y prête pas vraiment. Qu’en pensez-vous ? Pourriez-vous convaincre un de vos clients de communiquer à travers cet univers ?

Charlotte Dominique : C’est une idée reçue ! Le vin se prête tout à fait à la mixologie. Et oui, quand on pense vin, il ne faut pas forcément penser vin rouge tranquille, quoiqu’il existe de très bons cocktails à base de vin rouge. N’avez-vous jamais consommé de champagne dans un cocktail comme dans Le French 75 ? Et le Prosecco qu’il y a dans le Spritz, c’est évidemment un vin. Il existe aussi un cocktail très sympa à base de Sauternes, c’est un vin blanc liquoreux, de Perrier et de citron. Une sorte de Mojito, moins élevé en degrés d’alcool. Bref une multitude de possibilités, aussi nombreuses que de styles de vins existent. Nous travaillons d’ailleurs avec des mixologues qui créent régulièrement de très bons cocktails exclusifs à base de vin pour nos clients.

 

JUPDLC : Pourriez-vous nous décrire deux ou trois de vos dernières collaborations ?

Charlotte Dominique : Un des blogtrip qui m’a le plus marqué, car c’était un vrai challenge, c’était pour une interprofession de vin. Nous avons imaginé, organisé et géré un voyage de 3 jours pendant les vendanges pour 10 influenceurs nationaux (Paris, Bordeaux, Corse, Marseille, Sud-Ouest et Est de la France) et un autre venant de Belgique. L’idée était de leur faire vivre une expérience unique, au cœur de ce vignoble avec comme fil conducteur : l’environnement durable. Nos invités avaient des thématiques différentes et complémentaires : vin, voyage, cuisine et lifestyle. Nous avions donc prévu des activités très différentes tout au long du séjour : cours de cuisine, visite de domaines viticoles, déjeuner dans les vignes, peinture avec du vin, pigeage du raisin avec les pieds…

vigne-strategie-infuence-loi-evin
Crédit photo : Unsplash / @pass-imagination

Une très belle ambiance pour ce groupe, c’est la clé d’un bon blogtrip, et donc de très beaux résultats. Nous avons eu plus de 700 retombées (réseaux sociaux et articles) pour plus d’un million d’impressions totales et 40 000 interactions.

En ce moment, nous travaillons sur un projet de voyage de presse pour un vignoble bordelais qui produit plusieurs couleurs de vin (rouge, blanc, rosé). Notre objectif est de faire vivre une expérience unique pour chacune des couleurs. Nous avons la chance en Gironde d’avoir des paysages et prestations incroyables : du Bassin d’Arcachon au vignoble en passant par la ville de Bordeaux… Nous prévoyons une dégustation d’huîtres et de vin blanc sur le bassin ainsi qu’un pique-nique en montgolfière au-dessus du vignoble !

 

Pour en savoir plus sur l’agence Toutlevin, rendez-vous sur sa page dédiée !

Page agence Toutlevin

Tag :

emoji-email Ne manquez aucune actualité, abonnez-vous !

Chaque semaine, le meilleur de la communication et du digital directement dans votre inbox...