La publicité en pleine transition écologique 

En collaboration avec ISEG
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La critique publicitaire est apparue au début du 20e siècle. Longtemps, cette critique s’est focalisée sur les aspects idéologiques d’une persuasion d’achat considérée comme insidieuse. Depuis quelques mois, elle s’est focalisée sur les impacts environnementaux. Le rôle de la publicité est alors remis en question et celle-ci entame sa transition écologique.

 

Une redéfinition de la publicité

Depuis plusieurs années, la question de la publicité revient régulièrement dans le débat public. La demande ministérielle du 20 septembre 2019 de la rédaction d’un rapport sur la publicité et la transition écologique témoigne de cette prise de conscience.

Dans une directive de septembre 1984, L’Union Européenne utilise comme définition de la publicité : « toute forme de communication faite dans le cadre d’une activité́ commerciale, industrielle, artisanale ou libérale dans le but de promouvoir la fourniture de biens et services ». Dans ce dernier rapport du 20 septembre 2019, cette définition est élargie, correspondant ainsi « aux dépenses de communication sous la forme d’un achat d’espace dans un support de masse (internet, télévisions, presse, affichage, radio, cinéma). Elle comprend les actions où l’entreprise paye soit en termes d’achat d’espace, soit pour des actions de marketing, de parrainage, de communication évènementielle, et enfin les dépenses gagnées, notamment grâce à l’action des influenceurs. Ainsi, les actions hors achat d’espace sont intégrées dans l’analyse, à l’exemple des messages diffusés sur les réseaux sociaux, les imprimés publicitaires, la communication évènementielle, ou encore les vitrines des magasins.

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La publicité et ses acteurs ont bien raison d’évoluer, suivant alors les tendances des consommateurs. Ainsi, suivant les derniers rapports, 63% des Français interrogés ont une confiance renforcée auprès d’une entreprise si elle propose des produits durables. De plus, près de 9 Français sur 10 considèrent que les entreprises les incitent à la surconsommation, et 78 % souhaiteraient disposer d’informations sur l’impact environnemental et social des biens qu’ils achètent.

 

Quels impacts sur l’environnement ?

Selon plusieurs rapports, la publicité a des conséquences directes en matière de gaz à effet de serre. Elle a un impact sur l’utilisation du papier et la consommation d’énergie via internet ou les médias audiovisuels. Spontanément, la plupart des professionnels la juge limitée, mais rien ne permet de la mesurer précisément. Aucune statistique n’existe à ce propos, tant pour la profession dans son ensemble que pour une agence ou pour une direction de communication d’entreprise.

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L’impact environnemental indirect est lié à l’accroissement de la consommation des produits qu’il génère. Celui-ci s’observe à la fois dans le processus de production des produits, qui génère des émissions de gaz à effet de serre et perturbe à plus ou moins grande échelle le milieu naturel, mais aussi dans son transport et la production de déchets qu’il entraîne. Cet impact est différencié́ selon la nature du produit et les techniques utilisées.

Selon l’économiste Tim Jackson, la publicité ruinerait même toute démarche de prise de conscience écologique, car ses messages contredisent les discours de responsabilisation : « Prier instamment les citoyens d’agir contre le CO2, d’isoler leur maison, de baisser leur thermostat, de mettre un gros pull, de prendre un peu moins la voiture, de marcher un peu plus, de passer les vacances à la maison, d’acheter des produits locaux, toutes ces demandes resteront inaudibles ou seront rejetées comme de la manipulation tant que tous les messages relatifs à la consommation iront dans la direction opposée ».

 

Les acteurs de la publicité changent d’écosystème

Le Conseil Paritaire de la Publicité de l’ARPP publie le 30 septembre 2019 un avis « développement durable ». Il en va de même du Conseil de l’Éthique Publicitaire le 15 octobre 2019, avec son avis « Questions écologiques et publicité ». Dotée d’un budget de 3,6 millions d’Euros, l’ARPP est une association loi de 1901 qui représente 800 entreprises. Les trois quarts des 100 premiers annonceurs sont membres de l’ARPP. Ceux-ci s’accordent sur des recommandations qu’ils s’engagent à respecter. Toute publicité télévisuelle doit d’ailleurs préalablement avoir été visionnée par l’ARPP.

De son côté, l’Union des Marques organise le 31 janvier 2020 la première matinée du marketing et de la communication responsable où 40 entreprises prennent 15 grands engagements. L’UDM travaille également sur l’idée de construire une charte sur le climat incluant les engagements de la profession. Un groupe de travail a été mis en place afin d’élaborer une grille de lecture pour la représentation des bons comportements dans les messages publicitaires.

« Nous constatons que, sans une démarche RSE définie et claire au sein d’une agence, certains clients refusent de travailler avec ces agence », complète Sarah Barukh, intervenante en stratégie de communication éthique à l’ISEG.

Certaines agences modifient leur modèle. Pour exemple, Publicis lance le 11 mars 2020 le programme « No Impact for big impact » pour un objectif 2025 de 100% des campagnes proposées aux clients écoconçus, 100% éco produites et dotées d’un bilan carbone. Elle met en place un programme de formation interne autour de ces enjeux et propose à ses clients des options de compensation carbone. De son côté, Havas, qui annonce avoir réduit de 30% son impact carbone entre 2018 et 2019, propose également depuis mars 2020, à l’ensemble de ses clients un outil de mesure de l’impact carbone de leurs campagnes, afin de leur permettre de pondérer l’efficacité commerciale avec le moindre impact environnemental. Enfin, à la suite de la publication en janvier 2020 du guide ADEME de la Communication responsable, l’association Cap Com, qui fédère un réseau de 25 000 communicants publics en France, décide de mobiliser ses adhérents sur le sujet.

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Le marché de la publicité en 2020

Selon les derniers chiffres connus portant sur l’année 2020, délivré par le Baromètre Unifié du Marché Publicitaire (BUMP par France Pub, Irep, et Kantar), les recettes publicitaires nettes totales du marché publicitaire incluant le digital s’élèvent à 13,337 milliards d’euros pour l’année 2020, en baisse de -11,4% par rapport à 2019. Elles incluent le périmètre observé par l’IREP (télévision, cinéma, radio, presse, publicité extérieure, annuaires, courrier publicitaire, imprimés sans adresse) ainsi que les recettes internet (search, display, social et autres leviers – cf. Observatoire de l’e-pub SRI en partenariat avec l’UDECAM, réalisé par Oliver Wyman). Ces résultats prennent également en compte les recettes nettes digitales de la télévision, de la presse, de la radio et de la publicité extérieure.

De son côté, le marché publicitaire 2020, comprenant les médias traditionnels, digitaux et le social mobile, a comptabilisé 60 809 annonceurs sur l’ensemble des médias, soit un net repli de -9%, contre 2019. C’est sur cette tendance baissière que 2020 avait commencé avec -8% d’annonceurs au 1er trimestre, mais la crise sanitaire et le confinement ont poussé les annonceurs à stopper ou annuler leurs campagnes, ce qui a engendré une perte de -28% d’intervenants au 2ème trimestre. Les trimestres suivants ont finalement contenu la baisse avec respectivement -9% et -7% d’annonceurs.

La distribution reste le 1er secteur en 2020 avec 15,8% de part de voix nette contre 15,5% en 2019. Le secteur a pourtant accusé une baisse de -13%, mais ce résultat résulte essentiellement du repli des enseignes spécialisées (-22%), quand les généralistes ont été stables en 2020. Le secteur banque assurance a clôturé l’année au 2ème rang avec un léger repli de son activité à -1% tandis que l’automobile a reculé de -19% et est passé au 3ème rang des secteurs. Tourisme et culture loisirs ont, bien sûr, été les deux secteurs les plus impactés avec des baisses respectives de -33% et -42%.

Côté annonceurs, le classement des annonceurs place E.Leclerc comme leader 2020 avec une pression brute en légère hausse (+1,3%). Une tendance observée pour les autres grandes enseignes généralistes du top 10: Intermarché avec +22,2% de pression qui a gagné 4 rangs et Carrefour qui est classé 3 rangs de mieux avec un budget brut en hausse de +6%. Quant à Lidl, l’enseigne semble avoir stabilisé sa pression en 2020 (+1%) alors qu’Amazon a évolué à +3,8%. À noter également la forte croissance de Bouygues Telecom (+44,8%) qui s’est hissé au 9ème rang, soit 8 rangs de mieux qu’en 2019. À l’inverse, Orange est orienté à la baisse à-8,7%. Mc Donalds ferme ce top 10 et a gagné 3 rangs en 2020 malgré un budget brut en repli de -3%.

 

La transition écologique en marche ?

Dans ce dernier Baromètre, France Pub, L’Irep et Kantar ont proposé un focus sur la transition écologique. Ainsi, la loi « climat et résilience » est au cœur de l’actualité et concerne beaucoup de secteurs fondamentaux, dont la publicité qui se doit d’être plus responsable dans tous ses aspects. Pour l’automobile, on constate une forte croissance des communications sur l’électrique avec 28 annonceurs positionnés sur ce segment en 2020contre 16 en 2018. Les publicités pour les véhicules électriques représentent désormais 12% de leur pression brute, c’est 8 points de mieux qu’en 2018. Même constat pour les modèles hybrides, bien plus présents dans les médias en 2020. Cette tendance s’accélère en 2021. Sur le secteur de l’alimentation, on constate une évolution permanente des publicités pour les produits Bio, laquelle se traduit en 2020 par une hausse de la pression publicitaire (+5%) et des marques plus nombreuses sur ce segment. Concernant l’entretien, les marques vertes ont nettement renforcé leurs communications en 2020 avec +51% de pression brute, mais les autres fabricants ont aussi développé cette thématique dans leurs publicités avec pour certaines une forte incitation à l’anti-gaspillage. Enfin, ces résultats prouvent que les consommateurs sont de plus en plus soucieux et responsables sur toutes les questions liées à l’environnement, les marques communiquent nettement plus sur tous ces sujets et de nouveaux acteurs ou produits font leur apparition pour prendre une place majeure dans le quotidien des Français.

A noter que cette thématique est prise à bras le corps par la jeune génération. Ces derniers se mobilisent. « Il est évident que de nombreux jeunes ne souhaitent pas travailler dans certaines agences qui ne présentent pas une démarche RSE », ajoute Sarah Barukh, intervenante en stratégie de communication éthique à l’ISEG. Il y a un véritable enjeu pour attirer les plus jeunes. Quoi qu’il en soit, la mise en place d’une démarche RSE au sein d’une agence ou d’un annonceur nécessite un investissement financier.

 

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