Parfois redouté, et pourtant incontournable : GA4 est devenu le nouvel allié des marketeurs. Lancée en juillet 2024 pour remplacer Universal Analytics, cette plateforme de mesure signée Google peut d’abord dérouter par son apparence technique et son jargon complexe. Mais pas de panique : derrière cette complexité apparente se cache un outil puissant, et finalement très accessible, à condition d’en comprendre les fondamentaux. Car GA4 ne se contente pas de compter les visites : il raconte des histoires. Des histoires de parcours, de comportements, de conversions. Et surtout, des opportunités concrètes pour optimiser l’efficacité de son site.
Pourquoi s’intéresser à GA4, et surtout : comment l’exploiter intelligemment ? De l’analyse fine des pages de destination aux parcours utilisateurs, en passant par les taux d’engagement ou de sortie, cet outil peut transformer un tableau de bord en levier de performance. Pour nous guider dans cette exploration, nous avons interrogé Cédric Sonrel, Head of Data Analytics chez CyberCité. Son credo : démystifier GA4, et montrer comment il peut devenir un outil clair, actionnable et redoutablement efficace pour piloter ses stratégies digitales.

JUPDLC : Entrons dans le vif du sujet. Pouvez-vous nous présenter Google Analytics 4 (GA4) ? En quoi est-il essentiel de s’y intéresser ?
Cédric Sonrel : Google Analytics 4 (ou GA4, pour les intimes) a été lancé officiellement en juillet 2024, lorsque son ancienne version, Universal Analytics, a cessé de collecter des données. En quelques mots, c’est une plateforme de collecte statistiques, tout comme « Matomo », « Piwik Pro », « Piano Analytic » pour ne citer qu’elles.
Ces plateformes vont donner des indicateurs sur 3 types de données qui sont essentielles au pilotage des actions marketing :
- Des données d’acquisition : qui vont permettre de répondre aux questions du type « comment et combien de personnes arrivent/visitent mon site ? »
- Des données de conversions : qui vont permettre de savoir si les visiteurs « transforment » sur un site (soumission d’un formulaire de contact ou de devis pour des sites de leads, achat ou inscription pour des sites d’e-commerce, etc.)
- Des données de consommation : pour comprendre les usages d’un site par les audiences : les principales pages vues, les cheminements vers une conversion ou encore les abandons ou les pertes d’audiences.
Là où GA4 va plus loin, c’est dans sa capacité à aller « creuser » la donnée et à construire des reportings fins. Et ce, notamment au travers des explorations, des entonnoirs de conversions, encore de la création de propres rapports qui vont au-delà des rapports natifs.
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JUPDLC : Vous proposez plusieurs analyses pour aller plus loin. Penchons-nous d’abord sur l’analyse des pages de destination (la première page sur laquelle les visiteurs accèdent). Quels sont vos conseils ?
Cédric Sonrel : À mon sens, l’analyse des pages de destinations est un des premiers indicateurs de connaissance de vos audiences. Elle permet, dans de nombreux cas, de déterminer une forme d’intention de recherche de leur part.
- Arrivent-elles via un levier d’acquisition « direct » sur la home page ? Cela indique sûrement une audience déjà connue.
- Arrivent-elles sur un article de blog informationnel via un levier organique ? Cela laisse sous-entendre une intention d’information, de recherche de conseils. L’objectif sera ensuite de l’engager vers des pages plus « transactionnelles ».
- Arrivent-elles sur une page produit depuis Google Shopping ? Cela laisse à penser une requête plus transactionnelle et dans ce cas, il faut rapidement la convaincre de passer à l’acte d’achat (CTA, réassurance, politique de prix…)
Au-delà de ces considérations unitaires, l’analyse des pages de destination passe aussi par leur regroupement. On peut alors étudier le pourcentage d’audience arrivant sur la page d’accueil, les pages produits, les pages de listes de produits ou le blog. Cela permet de déterminer si, sur certaines typologies, on est en souffrance ou non.
« GA4 est un outil parfait pour avoir une bonne photographie de son acquisition. »
JUPDLC : Une fois ces analyses faites, quelles sont les questions à se poser pour optimiser les pages de destination ?
Cédric Sonrel : Sans pouvoir donner des répartitions « types », il faut se poser la question du potentiel de ces typologies de pages par rapport aux pourcentages de répartition.
- Un site réalisant 40% de ces entrées sur sa home page doit se poser la question de son SEO hors marque.
- Un site possédant 5000 produits, mais ne réalisant que 4% de ses entrées sur ces pages, doit sans doute envisager des leviers comme Google Shopping (gratuit ou payant) ou un travail SEO plus poussé.
- Un site e-commerce voyant 10% de ces entrées sur un blog devra se poser la question de la mécanique de renvoi vers des pages E-commerce.
GA4 est un outil parfait pour avoir une bonne photographie de son acquisition, car chacune se voit attribuer les différentes conversions du site. Au-delà des données de visites ou de sessions, qui sont purement quantitatives, on peut aussi analyser la capacité de ces pages à convertir en regardant des indicateurs comme le taux d’évènement clé de la session ou le revenu généré par la page. Cela permettra par exemple de comprendre pourquoi deux pages de même typologie, réalisant le même volume de visites, n’ont pas le même taux de conversion.

JUPDLC : Comment arbitrer les résultats et décider où investir ses efforts ?
Cédric Sonrel : Tout d’abord, je conseille de mettre en place des explorations ou de créer des rapports dédiés à ces segmentations de données. Cela permettra de suivre l’évolution des sessions démarrant sur votre home, vos produits, vos pages expertises, etc. Et de savoir si le trafic augmente, baisse ou stagne dans le temps.
La seconde étape est de déterminer le potentiel de vos typologies de pages. Reprenons mon exemple d’un site e-commerce de 5000 produits ne réalisant que 4% de ces entrées sur ces pages. Une analyse des impressions ou des positionnements dans la Google Search Console – ou dans des outils dédiés au SEO comme Semrush – donnera des indications sur le potentiel des pages, sur la recherche d’opportunités et, in fine, sur les actions à prendre.
L’analyse de la concurrence avec des outils comme Similar Web peut aussi vous aider. Et, bien sûr, votre propre expertise qui peut compter pour beaucoup. N’oubliez jamais que vous connaissez votre site, vos cibles, votre saisonnalité et le potentiel de vos thématiques.
JUPDLC : Après l’acquisition, la conversion ! Pouvez-vous nous expliquer ce qu’est le taux d’engagement, qui en est le premier KPI ? Comment l’analyser ?
Cédric Sonrel : Avant de préciser mon propos, il est effectivement essentiel de définir vulgairement ce qu’est le taux d’engagement dans GA4. Il s’agit, pour faire simple, du contraire du taux de rebond que nous avions dans Universal Analytics. Partez du principe que plus votre taux d’engagement est élevé, plus une page de destination est capable d’engager votre audience sur d’autres pages de votre site.
L’analyse du taux d’engagement repose donc essentiellement sur l’analyse des pages de destination et ses segmentations par typologie de pages. L’erreur la plus commune pour analyser le taux d’engagement est d’en faire une moyenne générale et de constater, par exemple : « Au mois de juillet, le taux d’engagement sur le site est de 77% en baisse de 5% ». Cette analyse n’a pas de sens, car selon les typologies de pages, le taux d’engagement ne sera pas le même.
Ainsi, une home page doit avoir un taux d’engagement très élevé. C’est la page par excellence où la chose que nous attendons de la part de l’audience est de cliquer sur un lien (slider, menu, promotions, etc.). Des pages de listes d’articles ou de produits ou encore une page « expertises » présentant vos différentes offres doivent aussi avoir des taux d’engagement assez élevés. On pense généralement aux clics sur les articles de blog, sur un produit ou sur vos expertises.
Et c’est ici que la magie opère. Pourquoi sur des pages « dont l’objectif est le même », voient leur taux d’engagement varier par rapport à la moyenne de cette typologie de pages ? Pas assez de CTAs, contenus trop longs ou mal hiérarchisés… Les raisons peuvent être multiples, mais l’avantage de cette analyse est de mettre le poids du corps sur les bonnes pages à optimiser.

JUPDLC : Parlons désormais des parcours utilisateurs : comment les analyser et identifier les points de frictions (là où ils l’abandonnent) via GA4 ? Quelles actions peut-on entreprendre pour y remédier ?
Cédric Sonrel : Comme je l’ai précisé en introduction, le modèle de GA4 est basé sur des évènements. Tout est ainsi analysable de manière linéaire, car chaque action de l’audience compte pour 1. Avec une bonne connaissance du nom des événements et une bonne connaissance du parcours client pour réaliser une conversion, on peut être en mesure de créer un entonnoir de conversion et de pointer les principales fuites d’audience.
Et pour bien nommer vos audiences, cela s’apprend ! Mais vous pouvez aussi vous tourner vers l’agence Data qui a mis en place votre plan de marquage. Autant pour la création du parcours, vous devez vous poser les questions suivantes : Que doit absolument faire mon audience pour transformer ? Quelles sont les pages à absolument voir ou les évènements à générer ?
« Avec une bonne connaissance du nom des événements et du parcours client, on peut être en mesure de créer un entonnoir de conversion et de pointer les principales fuites d’audience. »
Pour illustrer mon propos, si je devais me poser la question sur le parcours d’un site E-commerce, mon audience doit uniquement :
- Voir un produit
- Ajouter au panier
- Voir le panier
- Voir la page de livraison
- Voir la page de récapitulatif de paiement
- Mettre sa carte bleue
Pour un site de lead cela se résume parfois à :
- Voir la page du formulaire de devis
- Le soumettre
En réfléchissant de cette manière, vous allez pouvoir mettre en musique ce « parcours » type en construisant une « exploration » de type « entonnoir de conversion ». À vous de comprendre l’étape avec le plus de frictions et de convoquer la sacro-sainte réunion du « mardi ». Cette rencontre sera bénéfique, permettant une réflexion collective sur le problème majeur et l’élaboration de pistes d’optimisation. Le reste ne sera que : correctif, pilotage des résultats, boucle itérative sur la même étape ou en cas de réussite… Puis une nouvelle réunion du « mardi » sur un nouveau point de friction.

JUPDLC : Enfin, que sont les taux de sortie et en quoi leur analyse est-elle essentielle ? Comment s’y prendre ?
Cédric Sonrel : J’ai évoqué un peu plus en amont le concept de page de destination, à savoir la première page qui démarre une session. Mais il faut savoir qu’il existe aussi une donnée « cachée » dans GA4 : la page de sortie. C’est la dernière page que consulte votre audience pendant sa visite. Et cette donnée est un diamant brut que vous devez absolument analyser avec pertinence en gardant en tête que 100% de votre qui entre sur votre site en sort.
Ce constat simpliste me permet donc de pondérer mon propos en vous demandant de réfléchir à des pages sur lesquelles vous ne voulez pas que votre audience quitte votre site. Et si vous réfléchissez un peu, il y a des pages où l’on ne veut pas que l’audience sorte :
Pour un site E-commerce :
- La page panier
- La page de création de compte
- L’étape 1, 2 ou 3 de votre checkout
Pour un site de lead :
- La page de votre formulaire de contact, de brochure
- Sur l’étape 3 de votre formulaire de devis par exemple
« Sortir » sur ces pages est révélateur d’un problème de friction sur votre site. Une fois ces pages déterminées, il est alors simple de construire une exploration de type tableau en faisant appel à quelques dimensions et quelques métriques dans GA4.
« Surtout, tentez de simplifier au maximum les parcours. La surqualification est un frein à la conversion. »
JUPDLC : Quand une page connaît trop de fuites, quelles hypothèses faut-il explorer ? Et comment prioriser les tests d’optimisation ?
Cédric Sonrel : Que l’on analyse ces données au travers d’un entonnoir de conversion ou de l’analyse des taux de sorties, la première chose à faire et de se rendre sur la page en question puis :
- De faire vous-même le parcours en prenant le recul nécessaire, car vous connaissez parfaitement votre site, vous êtes dessus tous les jours et vous avez des biais.
- Faites tester par des personnes extérieures à votre organisation pour avoir un nouveau regard
- Tester le remplissage de vos formulaires
- Avez-vous des champs non-utiles ou trop qualifiants ?
Avez-vous des champs obligatoires qui ne sont pas mentionnés ? - Analyser le type de champ
Mais surtout, tentez de simplifier au maximum les parcours. Il est inutile de « demander toute leur vie » à vos prospects pour une demande de brochure. La surqualification est un frein à la conversion.

JUPDLC : Quels conseils donneriez-vous à une marque ou un e-commerçant qui veut aujourd’hui tirer pleinement parti de GA4 sans tomber dans la complexité technique ?
Cédric Sonrel : Cette question est dichotomique, car pour entrer dans les analyses que je viens de citer, il faut un peu de complexité technique !
Il faut d’une part un plan de marquage qui va aller au-delà des collectes basiques de GA4 et une phase d’apprentissage de l’interface GA4 pour tirer parti de ces données. Et c’est sans doute cette partie qui est complexe pour nos clients. Comment progresser sur cet outil à la fois simple et complexe tout en réalisant ces missions principales ?
« Dans GA4 tout est URL et si vous connaissez au moins cela, vous allez déjà pouvoir trier, segmenter, analyser. »
Et pour être plus concret, vous devez rapidement maîtriser :
- La notion d’événements dans GA4.
- Prendre le temps d’ouvrir des explorations pour connaître le nom des dimensions ou des métriques utiles et de construire vos analyses.
- Prendre le temps pour chaque rapport de l’interface de regarder comment la première colonne (souvent des pages, des leviers, des catégories d’appareil), s’associe à des métriques (les colonnes de chiffres), afin de comprendre ensuite qui s’associe à quoi.
- Mais surtout, je pense aussi qu’il faut connaître son site web et plus particulièrement les URLs et ce qui se passe suite à une action : Quelle est la structure de vos pages ? Ou encore que se passe-t-il suite à un ajout panier ? Est-ce que je vais vers la page panier ou bien est-ce une pop in de validation qui s’ouvre ?
Dans GA4 tout est URL et si vous connaissez au moins cela, vous allez déjà pouvoir trier, segmenter, analyser.
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