À l’occasion des Cannes Lions 2024, toute l’équipe de J’ai un pote dans la com se mobilise pour vous faire vivre le festival comme si vous y étiez. Tout au long de la semaine, nous allons à la rencontre de personnalités issues du monde de la pub pour qu’elles nous partagent leurs insights sur cet événement phare, et leur vision des tendances qui façonnent – et façonneront ! – le secteur.
Dans cet article, nous recevons Mercedes Erra, Fondatrice & Présidente du Groupe BETC. Nous discuterons des actualités de BETC, de la place de la femme dans la publicité, de créativité et de diversité !
JUPDLC : Une récente étude de WARC a présenté BETC comme l’agence la plus créative au monde. Qu’avez-vous ressenti à cette annonce ?
Mercedes Erra : Cela fait plaisir d’être, tout d’un coup, l’agence la plus créative du monde. D’abord, parce que ce n’est pas facile. Nous avons toujours essayé d’être très bien classé dans le WARC, et de nous débrouiller pour figurer dans les cinq premières agences. Parce que, sachant le poids des États-Unis, sachant que WARC sait mieux ce qu’il s’y fait, sachant que dans les prix chacun défend sa patrie et que la France est un tout petit acteur, on ne peut pas être obsédé par le fait d’être premier. Et même si l’on travaille beaucoup pour le monde, ils connaissent un peu moins. Bien sûr, on est fiers. Cela nous aide. C’est quand même notre grand sujet, la créativité, quoi qu’on ait fait. D’ailleurs, je trouve qu’on l’a un peu laissée de côté, dans la réflexion, dans le digital, dans la réflexion sur les datas… On fait comme si le fond n’était pas l’essentiel. Moi, j’ai toujours pensé que le sujet essentiel, c’était ce qu’on a à dire et comment on le dit aux gens. Et donc, cela fait plaisir d’être récompensé pour cela. On est très respectueux.
JUPDLC : Entre les nombreuses récompenses aux Lions, parvenir à se hisser en tête du classement WARC Creative 100, le trentième anniversaire de BETC, 2024 est décidément une année spéciale ! Que célébrez-vous cette année aux Cannes Lions ?
Mercedes Erra : Nous célébrons cette position merveilleuse que l’on a aujourd’hui en termes de créativité, mais nous ne célébrons pas très longtemps. BETC est une agence qui travaille toujours à changer, à s’améliorer, plutôt qu’à être contente de soi. Je crois que BETC, c’est quand même l’histoire d’une réussite exemplaire en 30 ans. Et c’est une réussite mondiale. Je suis fière de la France, je suis fière de porter ce sujet, et je pense qu’on peut aller beaucoup plus loin encore ! On célèbre le fait qu’on va bosser davantage, que l’on va faire des choses encore plus intéressantes, que l’IA ne nous fait pas peur, qu’on cherchera à toujours mieux comprendre les gens. Et tout cela, on le célèbre avec quatre associés, les fondateurs et évidemment, et Bertille Toledano et Stéphane Xiberras, qui prennent la relève.
JUPDLC : Quels conseils donneriez-vous aux femmes qui souhaitent se lancer dans le monde de la publicité ?
Mercedes Erra : On ne se prend pas la tête pour se lancer dans le monde de la pub quand on est une femme. On travaille sur sa compétence. De manière générale, il faut se lancer dans le monde de la pub si l’on comprend bien ce que c’est. Il y a plein de gens qui viennent nous voir sans comprendre vraiment de quoi il s’agit. Moi, je suis stratège, donc ce que j’aime dans ce métier, c’est avant tout de réfléchir, de comprendre les gens… Et ce n’est jamais chose facile. J’ai beaucoup utilisé les sciences humaines. Je pense que c’est un métier profond, je pense qu’on n’est d’ailleurs pas assez payé pour ce métier profond. Si votre stratégie est stupide, vous pouvez faire le meilleur des films, cela ne marche pas.
Je pense qu’il faut y aller si elles sentent qu’elles aiment tout ça. Les stages peuvent aider à comprendre. Il ne faut jamais avoir peur d’être une femme. Moi, j’ai un petit faible pour elles. Je trouve qu’à cause de plein de sujets dont elles ont hérité, elles ont cette magnifique capacité d’être abstraites et concrètes à la fois, que j’adore. Je n’ai aucune inquiétude pour le succès des femmes. Il faut juste qu’elles pensent qu’elles n’ont pas d’enjeu, qu’elles se vivent comme indépendantes, qu’elles pensent que leur travail est fondamental et tout ira bien.
JUPDLC : Et tournons-nous un petit peu vers l’avenir. Comment voyez-vous BETC dans six mois ? Dans six ans ?
Mercedes Erra : Six mois, ce n’est pas bien loin, donc je pense que si l’on a encore réussi à changer des choses, à avoir de nouvelles réussites, etc., c’est déjà formidable. Et dans six ans, je souhaite juste que cette agence reste bien une agence française. Mais qu’elle continue à expliquer au monde que la diversité, ce n’est pas d’être Anglais, d’être Américain, ni même d’être Français. Que la vraie diversité, c’est d’avoir la capacité de mettre tout cela, tous ces pays différents, autour de soi. Alors que très longtemps, on m’a expliqué que « mettez-moi une équipe internationale », ça consistait à dire, « mettez-moi des Américains ou des Anglais. » Je pense que BETC a démontré le contraire. Et dans six ans, on ira plus loin encore. Je le souhaite très fort, mais j’ai confiance dans la suite.