Pour des raisons diverses et variées, de nombreuses marques démarrent leur activité en 100% digital. En effet, en plus d’un modèle économique avantageux, l’aventure du digital permet aux marques de faire preuve d’une grande flexibilité tout en ayant la possibilité de toucher un public à large échelle, parfois à l’international. Il n’est donc pas étonnant qu’entre 2019 et 2022, le nombre de marques 100% digital a doublé en France.
Pour ces marques, qu’on appelle communément des « DNVB », quel est l’intérêt de se lancer, en parallèle de leur activité digitale, dans le retail physique ? Quelle stratégie adopter ? Et surtout, quelle est la marche à suivre pour étendre son activité aux boutiques physiques ? Pour y répondre, nous avons rencontré Malo Bourdet et Pierre Greilsamer, Cofondateurs de l’agence WRKS, et Jonathan Weaver, CMO chez DB JOURNEY.
À la rencontre de l’équipe WRKS
JUPDLC : Tout d’abord, pouvez-vous nous expliquer ce qu’est une DNVB ?
WRKS : C’est l’acronyme de « Digital Native Vertical Brand ». Derrière ce terme très « start-up », on parle des entreprises qui vendent directement leurs produits aux consommateurs en ligne. Elles contrôlent généralement toute la chaîne de valeur, de la conception à la vente.
JUPDLC : Pour une marque, quel est l’intérêt de se lancer dans le 100% digital à ses débuts ?
WRKS : C’est une manière plus agile et moins onéreuse de tester son produit et de bâtir une audience sans engager des frais de développement physique.
Ce modèle permet également une croissance rapide en limitant les coûts d’exploitation qui peuvent s’alourdir quand l’on passe sur un modèle physique. Le 100% digital permet aussi à la marque de construire une véritable communauté en ligne avant de la rencontrer en physique.
JUPDLC : Pouvez-vous nous expliquer le concept de « phygital » ?
WRKS : C’est un concept qui fusionne les mondes physiques et digitaux, créant une expérience intégrée ou les interactions en ligne et hors ligne se complètent l’une et l’autre. Ce concept vise à offrir une expérience client qui soit plus impactante.
JUPDLC : Pouvez-vous nous expliquer votre rôle d’accompagnement des marques dans cette stratégie d’ouverture sur le retail physique ?
WRKS : En tant qu’agence de design, notre rôle consiste à créer des expériences uniques pour les marques dans le retail physique. Nous façonnons des concepts innovants qui captivent les consommateurs, renforcent l’identité de la marque et optimisent l’impact visuel, favorisant ainsi une connexion mémorable entre les marques et leurs clients dans l’espace physique du retail.
Notre expertise stratégique et créative vise à transformer ces espaces en des environnements engageants et différenciés, sans perdre de vue l’objectif commercial du point de vente. On apporte ainsi une réelle expertise au client avec notre expérience du terrain, les process, les mécaniques, la logique et la logistique d’implantation.
JUPDLC : Comment assurez-vous cette transition du digital vers les boutiques physiques ? Combien de temps prend ce processus ?
WRKS : Chaque cas est différent. Nous avons quand même élaboré un process et work flow « idéal » afin de permettre la meilleure exécution et de disposer de suffisamment de temps pour une réflexion approfondie, garantissant ainsi un résultat réussi et bien conçu.
La phase la plus importante est, en l’occurrence, la phase de brief initial. En général, on ne compte pas le temps passé sur cette étape-là, que l’on co-construit avec le client. Nous balayons durant cet échange le brief créatif (DA, matières, visus, image) mais également commercial (objectifs commerciaux, taux de sorties, assortiment, profondeur de gamme…)
Ensuite, on estime qu’il y a quatre étapes qui peuvent chacune prendre a minima deux voire plusieurs semaines : l’idéation de départ et le développement du concept, l’application du concept avec rendu 3D, la conception détaillée et les plans techniques, et enfin les questions de production et de logistique.
JUPDLC : Pourquoi peut-on dire que cette stratégie mise sur la complémentarité ?
WRKS : Une transition du digital vers les boutiques physiques peut être considérée comme une stratégie axée sur la complémentarité. En intégrant harmonieusement les canaux en ligne et hors ligne, les marques peuvent exploiter les avantages respectifs de chaque environnement pour offrir une expérience client globale et cohérente. Cela permet une interaction fluide entre les deux mondes, renforçant ainsi la présence de la marque tout en répondant aux attentes diverses des consommateurs.
JUPDLC : Selon vous, cette stratégie relève-t-elle d’un véritable choix ou s’agit-il plutôt d’une question de survie de la marque ?
WRKS : Cette question, c’est au client d’y répondre. Mais en réalité, il faut rencontrer son audience in real life comme on dit, c’est ensuite une question stratégique, d’envie, et de moyens !
JUPDLC : D’un point de vue stratégique, comment imaginez-vous le futur du retail ?
WRKS : Le retail se transforme et s’adapte. Notre vision est un retail « bespoke » mêlant architecture et design, un service haut de gamme lié à une expérience de marque forte (marketing). L’intérêt est de créer une destination pour le consommateur final et une plateforme de communication pour la marque.
Le retail c’est également une multitude de formats, du corner de 12m2 au flagship de 300 m2. Chaque format a donc ses différents enjeux, stratégies et objectifs. C’est pour cela que nous voyons l’intérêt pour les marques de travailler main dans la main avec des agences de retail design qui leur apporteront des solutions bespoke pour répondre à leurs stratégies et plans de développement.
Entrevue avec Jonathan Weaver de DB JOURNEY
JUPDLC : Pour une marque, quel est l’intérêt de se lancer dans le 100% digital à ses débuts ?
Jonathan Weaver : Eh bien, en se concentrant sur le D2C (Direct-to-consumer, N.D.L.R.), vous pouvez évaluer en temps réel l’expérience client. Sont-ils satisfaits, diffusent-ils l’histoire ? Cela vous permet de voir les pics et les creux de la demande, ce qui vous assure d’identifier votre propre modèle de croissance pour développer l’entreprise.
JUPDLC : Quels sont les points faibles d’une activité uniquement en ligne ?
Jonathan Weaver : Malgré les nombreux avantages, il y a aussi des inconvénients. L’expansion et l’acquisition de nouveaux clients doivent être réalisées soit par la force de la marque, soit par l’optimisation du funnel marketing. Cela signifie que vous êtes susceptible de subir des coûts fluctuants liés aux plateformes et également liés à la livraison au client sur le dernier kilomètre. La prise en compte de tous ces éléments a donc entraîné une évolution importante du modèle online.
JUPDLC : Combien de points de vente comptez-vous actuellement en France et dans le Monde ? Pour le client, quels sont les avantages d’une boutique physique ?
Jonathan Weaver : Nous avons quelques centaines de points de vente dans le monde entier et environ 50 en France. Il existe de nombreux avantages : tout d’abord, l’expérience que vous avez lorsque vous parlez à un membre du staff d’un magasin. Vous pouvez toucher les produits, de quoi sa matière est faite, mais aussi le tester sur place. Et surtout, la communauté qu’un magasin peut créer !
De plus, lorsque l’on a l’habitude de se rendre dans une enseigne, on sait qu’ils proposeront les bonnes marques adaptées à la fois au magasin et au consommateur. Par exemple, si vous allez chez GoodHood à Londres ou encore chez Merci à Paris, vous avez la certitude que ces marques sont celles que vous recherchez ou souhaitez acquérir !
JUPDLC : Pourquoi décider d’ouvrir des boutiques physiques lorsqu’on est une marque digitale ? Quels sont les objectifs à court et à long terme ?
Jonathan Weaver : Nous n’avons pas nos propres magasins, mais nous réalisons des pop-up avec Le Printemps, Wasted Talent, Harrods et bien d’autres marques. Pour nous, avoir une présence physique en B2B aide à renforcer la notoriété de la marque en plus de générer des revenus en magasin. Nous constatons également l’effet de halo, (comment la présence de la marque dans des pop-up de renom influe positivement sur la réputation de la marque et donc ses ventes, N.D.L.R.) sur notre activité D2C.
JUPDLC : Le panier moyen est-il plus élevé en boutique ou sur internet ? D’un point de vue purement économique, quel modèle offre le plus de rentabilité ?
Jonathan Weaver : En ligne, nous sommes totalement concentrés sur la construction de paniers d’achat. Le modèle DTC offre certainement une meilleure marge, qui s’améliore à mesure que vous développez votre activité grâce aux économies d’échelle. Cependant, cela étant dit, le rôle du B2B et du DTC, à mon avis, est de travailler en tandem. Par exemple, un excellent partenaire B2B crée un effet de halo sur le marché et est donc crucial pour la croissance à long terme des deux canaux.
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