L’univers de l’animation 3D évolue à un rythme effréné, en témoignent les nombreuses images qui donnent l’illusion d’un mouvement, désormais partout autour de nous ! Depuis le long-métrage d’animation Toy Story, bien connu du grand public, les techniques n’ont cessé de se perfectionner, et le secteur a connu un essor considérable. À présent, cette industrie attire de nombreux passionnés d’animation aux divers profils créatifs.
Avec l’émergence de nouvelles technologies, le perfectionnement de l’univers gaming et le déploiement des offres de streaming, quels sont, aujourd’hui, les débouchés ? Quels métiers sont accessibles ? Par quelles voies ? S’agit-il d’un secteur d’avenir ? Pour répondre à ces questions, nous avons rencontré Ekkarat Rodthong, responsable pédagogique axe 3D/animation à l’IIM Digital School.
JUPDLC : Concrètement, comment définiriez-vous ce qu’est l’animation 3D ?
Ekkarat Rodthong : Il s’agit, en quelque sorte, de la continuité du cinéma et du dessin animé traditionnel, qui utilisent une succession d’images fixes afin de créer l’illusion du mouvement (24 images par seconde). L’animation 3D consiste à créer cette illusion à l’aide d’outils informatiques et de personnages en images de synthèse. L’objectif final est le même : raconter une histoire, mais avec un médium différent !
JUPDLC : Quelle est la différence entre VFX et CGI ?
Ekkarat Rodthong : L’acronyme CGI (pour Computer Generated Imagery) désigne une image de synthèse. Elle peut être aussi bien utilisée pour un film d’animation 3D, donc un projet entièrement en image de synthèse, que pour du VFX (Visual Effects) qui consiste à mélanger des images de synthèse et des plans tournés avec de vrais acteurs afin de créer des effets visuels, comme les blockbusters.
Les CGI désignent donc l’image, tandis que les VFX ne sont que l’une des branches utilisant des CGI. À noter que les Anglo-saxons différencient les termes de VFX, des effets visuels numériques réalisés après tournage, c’est-à-dire en postproduction, et les SFX qui désignent les effets spéciaux pendant le tournage comme la pyrotechnie ou l’utilisation de prothèses.
JUPDLC : Quels sont les domaines d’application les plus importants de l’animation 3D ? Le cinéma, les jeux vidéo, la publicité ?
Ekkarat Rodthong : L’animation 3D ouvre un vaste champ d’applications. Les plus populaires étant le divertissement avec en tête les jeux vidéo, les films et séries d’animation 3D, ou encore les effets visuels numériques. Mais l’animation 3D est partout : que ce soit pour de l’audiovisuel, la publicité, les clips, les films d’entreprises… Même en image fixe, il suffit de regarder les publicités dans la rue, les transports… L’image 3D est omniprésente !
Pour simplifier, on peut distinguer d’une part le divertissement et la communication, qui utilisent l’animation 3D dans un but illustratif. Et d’autre part, les secteurs industriels comme l’automobile ou l’aéronautique, qui ont une approche plus scientifique, et utilisent des logiciels moins axés sur la créativité.
JUPDLC : L’année 2023 a été marquée par le fort essor du FOOH dans la communication et de ses images en CGI. Est-ce la démonstration concrète de la force de frappe de l’animation 3D ?
Ekkarat Rodthong : L’essor du FOOH est un exemple parfait d’une utilisation de l’animation 3D dans le secteur de la communication. En effet, le FOOH, pour “Fake Out Of Home” est une nouvelle tendance qui bouscule les codes de la communication. Cette technique consiste à créer, à coups de réalité augmentée, d’effets spéciaux et de CGI, de nouveaux mondes hyperréalistes et immersifs. De nombreuses marques ont d’ailleurs sauté sur la tendance, en témoignent certaines activations mémorables : des sacs Jacquemus qui se baladent dans Paris, l’annonce de la nouvelle mini-série GRISELDA sur Netflix, ou encore JD Sports qui habille Big Ben d’une doudoune The North Face.
Cela permet à des marques et des studios de combiner l’usage des réseaux sociaux, de l’AR et de l’animation 3D afin de créer le doute – voire le buzz – chez le spectateur. En somme, il s’agit de créer de l’illusion, de la magie… Comme au cinéma ! Sauf que là, c’est pour la promotion d’un produit.
Cependant, l’animation 3D n’a pas attendu cette mode pour créer des effets spectaculaires en situations réelles. Elle était déjà utilisée pour des projections sur bâtiments comme des cathédrales via le camera mapping ou autres expériences immersives.
JUPDLC : Les technologies de VFX et d’animation évoluent très rapidement, est-ce le cas aussi des métiers qui y sont liés ?
Ekkarat Rodthong : En effet, l’une des particularités de ces secteurs est qu’il y a une évolution, donc un apprentissage constant. Il est important pour un professionnel en animation 3D de réaliser une veille technologique et de continuer à se former aux nouvelles techniques, comme récemment avec l’usage du temps réel, ou les outils boostés à l’IA.
Cependant, on ne repart pas de zéro à chaque fois : ce sont des évolutions, donc les bases et les fondamentaux restent les mêmes, et doivent être déjà acquis. Un outil plus performant ne rendra pas meilleur un artiste moyen. Le logiciel ne crée pas, il exécute.
JUPDLC : Quand on est un jeune diplômé en animation 3D, vers quel secteur se tourner pour trouver un travail ? Y a-t-il un secteur qui recrute plus qu’un autre ?
Ekkarat Rodthong : Comme indiqué auparavant, l’animation 3D est présente dans quasiment tous les secteurs visuels. À l’IIM Digital School, dont je dirige l’axe Animation 3D, nous avons d’excellents chiffres de placement pour les stages en animation 3D. Cela est dû au fait que nous invitons nos étudiants à postuler également dans des secteurs comme l’architecture d’intérieure, le patrimoine, la communication, la visualisation de produits, etc. Et ce, en plus des secteurs du divertissement.
L’animation 3D dans les films, séries et VFX est le secteur le plus dynamique. La France est d’ailleurs le 3ème pays mondial en fabrication d’animations ! Beaucoup de succès récents sont réalisés tout ou en partie en France (la série Arcane, les films Super Mario ou TMNT Mutant Mayhem…). La majorité des postes sont sous le régime des intermittents du spectacle, les studios recrutant selon les projets en cours de fabrication, et les artistes n’hésitant pas à passer d’un studio à un autre selon leurs envies de collaborer sur tel ou tel projet… Le marché de l’emploi dans ce secteur est moins rigide que pour les contrats classiques.
Enfin, le gouvernement français soutient fortement le secteur des industries culturelles et créatives, avec des plans comme France 2030 « La grande fabrique de l’image », dont le but est de doubler le nombre de diplômés et la capacité de production en animation d’ici 2030.
JUPDLC : Quel est le meilleur moyen de taper dans l’œil d’un studio de VFX ou d’animation ?
Ekkarat Rodthong : Nous sommes un secteur visuel : ce ne sont pas les CV, les diplômes ou discours qui intéressent les studios, mais les compétences techniques et créatives. Les studios de VFX et d’animation ne recrutent un candidat que sur DemoReel. Il s’agit d’un book vidéo d’environ 2 minutes où l’on doit présenter le meilleur de ses travaux. La qualité de cette compilation est l’unique porte d’entrée afin d’obtenir un entretien dans ces studios.
Aujourd’hui, les jeunes graphistes ont un large panel de plateformes pour présenter leurs créations et se faire remarquer, qu’il s’agisse des réseaux sociaux grand public ou de sites de book spécialisés comme ArtStation.
JUPDLC : Pour terminer, avez-vous un conseil à donner aux potentiels futurs étudiants en animation 3D ?
Ekkarat Rodthong : Il faut être curieux et renforcer sa culture artistique : c’est bien de vouloir créer des mondes fantastiques peuplés de guerriers armés d’épées gigantesques contre des créatures, mais c’est mieux de se baser sur de véritables références. Par exemple, en allant voir de vrais glaives ou armures dans les musées, comment le métal réagit à la lumière, etc.
Les artistes européens, notamment français, ont une bonne réputation. De par notre patrimoine culturel, nous avons une multitude de musées en France. Il en va de même pour notre héritage et curiosité graphique : nous sommes autant friands de bandes dessinées franco-belges, que des comics ou mangas (la France étant le deuxième pays au monde consommateur de mangas).
On peut également se cultiver sur le secteur de l’animation 3D en regardant des reportages ou des making-of. Ceux-ci n’ont jamais été autant accessibles, notamment grâce aux plateformes de streaming, aux bonus présents sur les Blu-ray et DVD… Mon dernier conseil, et pas des moindres, serait de trouver une bonne école qui soit reconnue parmi les studios et instances du secteur comme le RECA, dont l’IIM est membre.
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